Année : 1996. Durée : 1 H 14'
Fiche technique :
Réalisation, scénario : Gérard Courant.
Image : Isabelle Fermon.
Son : Gérard Louis-Clément.
Montage : Élisabeth Moulinier.
Mixage : Valérie Cadène.
Conformation : Myriam Aycaguer.
Interprétation : Gérard Courant, Pierre Vavasseur, Serge Poljinsky, Joseph Morder, Olivier Dazat, Alain Riou, Élisabeth Moulinier, Raymond Poulidor, Marc Trémet, Henry Anglade, Jean Stablinski, Luc Moullet, Janine Anquetil, Bernard Hinault, Jean-François Bernard, Stephen Roche, Laurent Jalabert, Pascal Hervé, Laurent Brochard, Stéphane Heulot, Alberto Elli, Udo Bolts, Manuel Gines Fernandez, Marc Veyrat, René Courant, Yvette Courant.
Production : io Production (Dominique Pailler), Canal 9 Télévision, Centre National de la Cinématographie.
Développement : Xavier Villetard, Jacquie Chavance.
Financement : Astrid Drezet.
Direction de production : Claude Gilaizeau, Stéphane Legoux, Isabelle Saunois.
Administration : Fabienne Joligeon.
Distribution : Les Amis de Cinématon.
Tournage : 1er, 2, 9, 10, 11 juillet 1996 à Paris (France), 10 juillet 1996 à Courbevoie (France), 12 juillet 1996 à Saint-Maurice (France), 3 juillet 1996 à Dijon (France) et Pontailler-sur-Saône (France), 4 au 6 juillet 1996 dans les Alpes (France) : Chambéry, le col de la Madeleine, le Cormet de Roselend, Les Arcs.
Format de tournage : Vidéo Beta.
Format de diffusion : Béta numérique.
Procédé : Couleur.
Cadre : 4/3.
Collections publiques :
BNF (Bibliothèque Nationale de France), Paris (France).
Cinémathèque de Bourgogne-Jean Douchet, Dijon (France).
Première présentation publique :
1er novembre 1996, Canal 9 Télévision (France).
Principaux lieux de diffusion :
-Canal 9 Télévision (France) 1996.
-IFACC (Institut de Formation et d'Analyse à la Culture Cinématographique), Marly-le-Roi (France) 1996.
-Cinémathèque Française, Paris (France) 1997.
-ASBF (L'Association Sportive de la Banque de France Île-de-France), Paris (France) 1997.
-Festival de la Vallée des Terres Blanches, Seloncourt (France) 1997.
-Télévision TLM (Télévision Lyon Métropole), Lyon (France) 1997.
-Médiathèque Équinoxe, Châteauroux (France) 1997.
-Musée d'art moderne et d'art contemporain, Strasbourg (France) 2001.
-Télévision Zaléa TV, Paris (France) 2001.
-Télévision Planète (France) 2003.
-Télévision Planète 2 (France) 2003.
-Festival International du Cinéma Méditerranéen, Montpellier (France) 2003.
-Gulf Film Festival, Dubaï (Émirats Arabes Unis) 2011.
-Festival Cinéma et Vélo, Olonne-sur-Mer (France), 2011.
-Site YouTube, 2012.
Prix, récompenses, distinctions, palmarès :
-Classé 34ème de la liste de 35 films, A Sundy in Hell, par Muckapedia, site Letterboxd (Nouvelle-Zélande), 2020.
-Fait partie de la liste de 379 films, Thats Edutainment! A long list of Educational, Instructional and Industrial films!, établie par Dana Woolery, site Letterboxd (Nouvelle-Zélande), 2021.
Sortie DVD : 7 octobre 2011, éditions L'Harmattan, Paris (France).
J'ai été invité à suivre l'étape de montagne Chambéry-Les Arcs du Tour de France 1996 dans le décor grandiose des grands cols des Alpes. À la suite d'un pari avec Alain Riou, j'ai décidé de faire à vélo cette même étape quelques jours avant les coureurs. Commence alors un parcours initiatique fait de réminiscences de mon enfance et de rencontres insolites et drôles.
Nous étions au début du mois de juin 1996 et je participais à un cocktail dans la salle de cinéma du ministère des transports qui suivait la projection du film d'un ami cinéaste. Je discutais avec beaucoup d'enthousiasme sur ma passion du vélo avec Xavier Villetard, un producteur de ma connaissance avec qui j'avais un projet de film. Il m'a laissé parler pendant une bonne vingtaine de minutes et, à la fin de mon long monologue, il m'a suggéré l'idée de faire un film sur mon amour du vélo qu'il produirait si je pouvais lui écrire un projet. Je me mis aussitôt au travail et, deux jours plus tard, je lui apportai un scénario qu'il accepta sur le champ. Un mois plus tard, j'étais en tournage dans les Alpes et je concrétisai un rêve d'enfance : comme un coureur cycliste professionnel, j'étais payé pour faire du vélo !
Le résultat ? C'est Chambéry-Les Arcs, une vélographie de Gérard Courant, 74 minutes de passion partagées par des amis amoureux de la petite reine, tels les journalistes Pierre Vavasseur et Alain Riou, l'écrivain et scénariste Olivier Dazat, les cinéastes Luc Moullet et Serge Poljinsky et la rencontre des champions mythiques de mes jeunes années : Raymond Poulidor, Henry Anglade, Jean Stablinski ou encore Janine Anquetil, la femme du mythique Jacques Anquetil.
(Gérard Courant)
Fun and heartfelt tribute to the Tour de France, a "vélographie" of the difficult (leg) Chambery-Les Arcs by Gérard Courant a few days before the runners.
(G. C.)
C’est l’histoire d’un cinéaste fou de vélo. Gérard Courant, auteur d’une oeuvre unique, les Cinématons (à ce jour 1812 portraits d’artistes, écrivains, etc) et d’une douzaine de longs-métrages, est fasciné par les « forçats de la route », les Bartali, Coppi, Anquetil, qui ont écrit l’histoire du vélo dans la sueur et les larmes. En 1996, grâce au Parisien-Aujourd’hui, il a pu se rendre sur le Tour de France et, chanceux, s’est trouvé au milieu de l’étape historique (« dantesque » comme disent volontiers les cyclistes) du 6 juillet, Chambéry-Les Arcs.
Il en a profité pour réaliser un vieux rêve, un film sur sa passion du vélo. Cette émouvante autobiographie d’un amant de la petite reine, qui a reçu le soutien du Centre National de la Cinématographie, s’appelle tout simplement Chambéry-Les Arcs. Le cinéaste y raconte comment, enfant, il couvrait des cahiers d’écolier de classement d’étapes, comment il a parcouru à vélo une partie de la route Chambéry-Les Arcs avec un copain journaliste, Alain Riou. Il a aussi filmé Janine Anquetil, Stephen Roche, Raymond Poulidor, le « Village du Tour », l’étape vue de la voiture du Parisien-Aujourd’hui, avec Radio-Tour en fond sonore. Cette oeuvre très personnelle est un travail d’artiste, loin des retransmissions télévisées, un régal pour cinéphiles où se retrouveront tous les fanas du vélo.
(Élisabeth Santacreu, Le Parisien, 9 janvier 1997)
Gérard Courant est un nom prédestiné pour un metteur en scène vélopohile qui a déjà une douzaine de longs-métrages et un record – Cinématons, le film le plus long du monde : 120 heures ! – à son palmarès. Et le voici qui part à la conquête d’un sommet, sur la butte du Trocadéro à Paris, puisqu’il présentera à la Cinémathèque française, au palais de Chaillot, jeudi à 20 heures, sa dernière réalisation : Chambéry-Les Arcs. Invité à suivre l’étape géante du dernier Tour, sous le déluge du 6 juillet dernier, cet amoureux de la petite reine, assidu pratiquant, décide de la parcourir lui-même à bicyclette quelques jours avant les coureurs. Sa randonnée se transforme alors en un étonnant parcours initiatique fait de réminiscences et de rencontres insolites. C’est ainsi qu’il découvrira au tournant, le souffle court, mais le regard toujours clair, des personnages savoureux comme Janine Anquetil, Raymond Poulidor ou Bernard Hinault. Une bonne roue à prendre.
(Christian Montaignac, L’Équipe, 3 janvier 1997).
PLANÈTE. Lundi 15 juillet. 20 h 45. Chambéry-Les Arcs, une vélographie de Gérard Courant. 75 min.
Cinéaste avant-gardiste, Gérard Courant est aussi un amoureux de la petite reine depuis la fin des années 50. Il lui a dédié ce journal intime filmé en 1996. On feuillette avec curiosité cet hymne au Tour de France qui vaut surtout le coup d’œil pour l’ascension picaresque du col de la Madeleine par l’auteur et le critique Alain Riou, perchés sur leur guidon, avec le chien Raoul dans les roues. Irrésistible.
(Patrick Lafayette, L’Équipe magazine, juillet 2002).
Cycliste amateur mais émérite, Gérard Courant sait avec quelle application il convient de préparer son démarrage si l’on veut échapper au museau du peloton. Son documentaire, Chambéry-les Arcs, en est une brillante démonstration. Le 5 juillet 1996, accompagné de son copain Alain Riou, Gérard Courant affronta le col de la Madeleine, le Cormet de Roselend et la traversée de Tours-en-Savoie, où devaient dès le lendemain se défier les coureurs du Tour 1996. Plus que le récit de la performance du réalisateur (il gravit la Madeleine à 7,4km/h de moyenne, doublant parfois quelque chien assoupi...), ce film est un fabuleux exercice d’admiration. À travers la préparation de son équipée alpine, Gérard Courant raconte son amour pour la Grande Boucle. Doué d’une exceptionnelle érudition, Gérard Courant a peaufiné un film qui comblera les admirateurs des "forçats de la route". On lui pardonnera donc d’avoir abdiqué devant l’ascension des Arcs, pente finale de cette étape remportée par Luc Leblanc.
(Pascal Paillardet, La Vie, n°2967, 11 juillet 2002)
Hommage senti et amusant au Tour de France, cette « vélographie » du cinéaste Gérard Courant offre notamment l’occasion de le voir sur un vélo, réaliser (avec le critique de cinéma Alain Riou) la difficile étape Chambéry-Les Arcs, quelques jours avant le passage des coureurs.
(V. L., Télé Câble satellite, semaine du 13 au 19 juillet 2002). Et puis sur d’autres routes qui nous sont également proches, cette passion tenace pour le vélo, la bicyclette, la petite reine, avec des dents bien braquées sur les mollets. En selle pour de fameux cols. Gérard Courant, comme un autre ami du festival, le journaliste Alain Riou, qu’il filme avec un total respect sur les pentes alpines, n’est pas un buveur de bière rotant devant son téléviseur. C’est un praticien. Qui se met en selle et se met en scène et collectionne donc les cols (de montagne) comme d’autres les faux cols (de houblon). Avec Chambéry-Les Arcs, c’est une passion commune (la précédente édition du Tour de France, après tous les avatars qu’a connu cette compétition, a montré une fois encore un engouement irrépressible dépassant largement le public national) qui est détaillée de façon personnelle. Sous forme d’enquête finalement, de mise à l’épreuve aussi, et avec cette fois une écriture très classique, voire tranquillement didactique, avec voix off et veuve de Jacques Anquetil. Pas de problème, le courant passe. (Jean-François Bourgeot, Catalogue du Festival du Cinéma Méditerranéen de Montpellier, 2003). JEAN-PAUL JAUD ET GÉRARD COURANT : DIALOGUE À DISTANCE Joints avant leur arrivée à Marseille, deux invités de notre table ronde Les gestes du sport ont tenu séparément des propos complémentaires. En attendant la rencontre de ce jour où les rejoindront Michel Hidalgo, sélectionneur de l’équipe de France championne d’Europe 84 et Laurent Carenzo, directeur de la communication de l’OM, voici la retranscription d’un premier dialogue reconstitué. Ici mis en relation : Jean-Paul Jaud, maître d’œuvre des directs sportifs de Canal Plus, et Gérard Courant, réalisateur passionné de cyclisme. Sylvain Coumoul : Regardez-vous le sport à la télévision dans le deuil d’un traitement plus « cinématographique » ? Jean-Paul Jaud : À l’époque où je faisais mes premiers directs pour la télévision de service public, l’idée même d’appliquer des principes de cinéma à la retransmission m’avait valu les foudres du journal L’Équipe. Il m’a fallu attendre d’intégrer Canal + pour expérimenter des techniques aujourd’hui considérées comme allant de soi : multiplicité des caméras et des angles de vue, l’idée du « montage en direct », recours au travelling, à la contre-plongée… Cela étant dit, au vu de ce qu’il reste à inventer, nous en sommes encore au Moyen Âge. À quand les caméras télécommandées, introduites parmi les spectateurs ? Gérard Courant : Lorsque je repense aux retransmissions du Tour de France du début des années soixante, je mesure les immenses progrès accomplis. On ne découvrait que les dix derniers kilomètres des étapes et quand il s’agissait des étapes de montagnes, dont l’arrivée ne se faisait que très rarement aux sommets des cols, mais dans la vallée, on ne voyait rien des efforts véritables des coureurs, de la bagarre, des duels qu’ils se livraient sur les pentes des cols. Aujourd’hui, on peut suivre une étape de montagne dans son intégralité avec quatre caméras sur moto et deux autres installées sur des hélicoptères avec la fameuse boule Wescam qui permet de faire des gros plans vus du ciel. De plus, deux reporters sur moto commentent la course en plus des journalistes qui la commentent de l’arrivée avec leurs écrans de contrôle. Aujourd’hui, le nombre de caméras me semble parfait. Je craindrais presque, à l’avenir, leur multiplication, tant l’équilibre actuel me paraît idéal. Plus de caméras nuiraient au spectacle. On risquerait de trop s’intéresser à des détails qui nous feraient perdre le fil de la course. C’est déjà le cas parfois quand une caméra saisit en queue de peloton la crevaison ou le lâchage d’un sans-grade pendant, qu’à l’avant, les grands s’expliquent pour la victoire. Malgré toute l’admiration que j’ai pour Godard, je pense qu’un événement sportif qu’il couvrirait nous ferait manquer l’essentiel de la course ou du match. Si l’on se met à filmer les pieds des tennismen alors que l’échange se poursuit, c’est sans doute passionnant comme expérimentation cinématographique, mais c’est catastrophique pour la compréhension du match ! Je sais bien que Godard s’intéresse à autre chose : les gestes, les mouvements, le choc entre deux plans… J.-P. J. : Le but, c’est de placer le spectateur à « x » places privilégiées. Or ce n’est pas toujours possible. Prenons le football moderne : avec la défense en zone, la règle du hors-jeu en devient l’essence ; il s’agit donc de placer une caméra aux dix-huit mètres. Or ce principe a connu un coup d’arrêt avec la Coupe du monde 98, lorsque Canal +, soumis aux exigences de la diffusion internationale des images, a dû se plier aux normes imposées par la Fédération Internationale de Football : le hors-jeu éventuel ne peut être trompé qu’en différé. Au prétexte que le spectateur du Sri Lanka n’a pas forcément notre lecture du jeu, même l’utilisation du travelling a été délaissée. G.C. : À propos de cette Coupe du monde 98, j’ai un regret éternel : après le but de Suker, lors de la demi-finale France-Croatie, on ignore comment a débuté l’action qui a conduit à l’égalisation rapide de Lilian Thuram. Pendant que la télévision passait et repassait le but croate au ralenti, l’action de jeu avait repris et Thuram fonçait vers le but adverse et s’apprêtait à égaliser. Nous n’en avons vu que les trente derniers mètres ! Où est passé le début de l’action ? Il y a là un vrai problème de montage ! J.-P. J. : Encore aujourd’hui, à l’Euro, le passage de plans très larges à des cadres au contraire trop resserrés produit un permanent sentiment de frustration. On voit un joueur qui crie, mais pas celui à qui s’adresse l’appel. G.C. : Il y a un abus de détails. Sylvain Coumoul : À l’inverse, sous quels aspects le sport à la télévision peut-il être un enseignement pour les réalisateurs de cinéma ? J.-P. J. : Personnellement, j’ai d’abord retiré cette expérience, par exemple pour mes films documentaires consacrés aux quatre saisons, un désir d’indépendance, d’être mon propre producteur. Ce sont les producteurs qui ont bradé la télévision, et les réalisateurs ont baissé les bras. Mais d’une façon plus générale, le direct sportif permet de prendre conscience de la nécessité du silence. Comme le disait Georges de Caunes, « le premier devoir du commentateur est de se taire ». Ne pas prendre le spectateur pour un non-voyant oblige à réfléchir sur le statut de l’image. Et cette leçon, très cinématographique, conduit à réfléchir sur les intervalles, la respiration des plans. G.C. : Les deux mondes de la télévision et du cinéma dialoguent entre culture de l’instant et nécessité du recul. Il existe de grands documentaires sur la compétition cycliste. Un dimanche en enfer de Jörgen Leth sur la course Paris-Roubaix 1976, que vous programmez à Marseille, est une totale réussite parce qu’il occupe exactement le terrain laissé libre par la retransmission en direct. Il montre tout ce que ne montre jamais le direct télévisé : les coulisses, les préparatifs à la veille de la course et il s’intéresse à des moments qui seraient évacués par la télévision, tel, ici, les manifestants du syndicat CGT du livre qui essaient de bloquer la course. Je pense aussi à un magnifique long plan-séquence où une caméra, postée dans un des premiers secteurs pavés, filme tous les coureurs, du premier au dernier, éparpillés en petits paquets. On les voit s’accrocher les uns aux autres, se battre pour ne pas lâcher prise. On découvre un effort absent des directs télévisés. Au contraire de la télévision, Jörgen Leth utilise de grands moyens d’images (plus de 30 caméras 35 mm) mais le montage, qui est instantané à la télévision, a demandé dans son cas un an de travail ! Le grand rendez-vous manqué entre sport et cinéma, c’est plutôt celui du cinéma de fiction. Par exemple, les films sur le Tour de France, tel Cinq tulipes rouges, sont souvent de simples « nanars » où le manque de moyens financiers est flagrant. La question, c’est : comment reconstituer un peloton de 200 coureurs et utiliser des dizaines de milliers de spectateurs ? Pour mon long métrage sur le cyclisme, Chambéry-Les Arcs, il m’a fallu passer par le détour de l’autobiographie pour mener à bien ma narration. (Propos recueillis par Sylvain Coumoul le 1er juillet 2004, Journal du FID Marseille, 3 juillet 2004). Quant à Chambéry-Les Arcs, je le qualifierais de film de la « résurgence ». La pratique du vélo, c’est finalement un long travelling venu de la roue avant (débitrice) pour s’amonceler sur la roue arrière (réceptrice) et qui nous raconterait pêle-mêle un agencement contenant l’enfance, la blessure, le paysage natal, la bagarre, la foule, la solitude, la souffrance, la beauté,… c’est-à-dire toutes choses qui forment un monde ! Et les films de la résurgence sont presque des films de cure, car ils font ressortir le passé mais comme cause du devenir pour nous permettre l’accès à la prochaine étape, au prochain franchissement ! (Philippe Leclert, juin 2009) Je crois que ce qui me plait le plus chez Gérard Courant, peut-être parce que je partage un peu cette manie, c’est sa délirante taxinomie. A tout prix, il faut qu’il classe, qu’il archive, qu’il recense tout. La caméra devient alors, par sa capacité à prélever des instants dans la chair du Réel et à les enregistrer, l’instrument idéal de ce désir inextinguible de fixer les choses. Si l’on me permet une petite anecdote personnelle, je confesse ici sans fanfaronnerie (puisque depuis, je voue une haine sans nom à ce sport !) que j’ai été un grand fanatique de football jusqu’à l’âge de 15/16 ans. Mais n’ayant jamais été un grand sportif, ce qui me passionnait le plus dans le foot, c’était de collecter les résultats chaque week-end, de coller des coupures de presse dans des cahiers, de constituer des listes, des classements… Or j’ai retrouvé un peu de ça dans la passion que Gérard Courant voue au vélo. Dans Chambéry – Les Arcs, il entreprend une sorte d’autobiographie à travers le prisme du cyclisme en se remémorant ses souvenirs d’enfance, en ouvrant ses boites d’archives et en énumérant les grands noms des coureurs qui l’ont fait rêver durant sa jeunesse (Anquetil, Poulidor…). Pour ma part, je dois encore avouer le rouge au front que le cyclisme est un domaine que je maîtrise à peu près autant que la politique agricole commune, la physique quantique ou la bourrée poitevine. Mon ignorance est telle qu’elle me relègue presque au niveau du conducteur de 4x4 boursouflé de suffisance qui exhibe sa médiocrité crasse en faisant du safari en centre-ville et en persistant à nier l’existence des chambres à air. Du coup, j’avoue avoir eu un peu peur d’être totalement largué devant un film ne cessant d’évoquer les performances des coureurs du Tour de France des années 60 et exaltant pendant près d’une heure et quart la petite reine. Et bien pas du tout ! Si je pense que Chambéry – Les Arcs réjouira les amateurs de vélo (parce que Courant est un vrai passionné et qu’il va à la rencontre de coureurs célèbres ou de la veuve de Jacques Anquetil), il ne laisse pas le cinéphile en queue de peloton (ok, j’arrête avec les métaphores sportives : je n’y connais absolument rien !). Ce qui touche dans cette « vélographie », c’est la manière dont Courant parvient à poursuivre quelques chapitres de son autobiographie et de son autoportrait (tous ses films en sont) à travers sa passion pour le cyclisme. Outre l’évocation de ses souvenirs qui le font revenir le temps d’un travelling à la main dans les rues de Dijon, il joue avec le vrai et le faux (des petits films Super 8 qui sont censés être des souvenirs de famille alors qu’ils sont des reconstitutions jouées. On y aperçoit d’ailleurs le fidèle complice Joseph Morder) et va discuter avec d’autres amoureux du vélo. Cela nous vaut un passage hilarant avec Luc Moullet où celui-ci, après avoir évoqué ses promenades dans les Alpes, avoue son plaisir d’emprunter les cols interdits et raconte (avec sa voix inimitable) une histoire abracadabrante d’ « engourdissement de phallus » qui vaut son pesant de cacahuètes ! De la même manière, Gérard Courant décide de parcourir une des étapes du Tour de France (Chambéry – Les Arcs, d’où le titre du film) avec le critique de cinéma, familier des auditeurs du Masque et la Plume, Alain Riou. Nos deux compères vont à un rythme qui n’a rien à voir avec les coureurs du Tour de France mais cette balade en vélo constitue un bon résumé du film de Courant : une flânerie qui n’hésite pas à prendre des chemins de traverses (il s’agit autant d’un autoportrait que d’un « documentaire sportif ») sans pour autant trahir son sujet et sa passion (le vélo). Le miracle, c’est que tout le monde s’y retrouve : les amateurs de cyclisme aussi bien que le cinéphile néophyte qui n’a jamais regardé de sa vie la moindre course de vélo… (Docteur Orlof, Le Blog du Docteur Orlof, 27 février 2010). C'est à l'initiative du bon Dr Orlof que j'ai invité le cinéaste Gérard Courant à Nice, en novembre dernier, pour une programmation en forme de découverte de son œuvre foisonnante. Le Doc, qui a entrepris un vaste travail d'exploration de cet auteur est venu présenter ce programme et m'a permis de rencontrer un réalisateur passionnant, un homme charmant et, surprise, un cinéphile des plus pointu. Gérard est également très organisé et pour l'occasion, il m'avait préparé quelques DVDs, jolie sélection de ses films, et il a fait preuve de psychologie à mon égard, à l'issue d'une conversation qui avait roulé, par hasard, sur le vélo : « Mais c'est Chambéry – Les Arcs qu'il faut que tu vois ». Aussitôt dit, aussitôt fait, je me suis retrouvé avec un disque de plus. Bien vu. Le vélo est le seul sport que j'ai jamais pratiqué volontairement (j'ai même participé à quelques courses, ce qui m'étonne encore moi-même), et Eddy Merckx est le seul sportif dont j'ai jamais eu le poster dans ma chambre d'enfant. Le Tour de France est la seule compétition sportive que j'ai jamais suivie et, encore aujourd'hui, il m'arrive à l'occasion de regarder chez les uns ou les autres une étape de montagne. Cinématographiquement, j'ai une tendresse particulière pour les scènes à vélo, rêvant d'un film épique sur le sujet. Récemment, je me suis régalé aux séquences de Les copains (1965) d'Yves Robert et aux ralentis sur Nathalie Baye pédalant dans Sauve qui peut (La vie) (1979) de Jean-Luc Godard. Il est peut être temps de préciser que Chambéry – Les Arcs est une étape du tour de France 1996 avec trois cols pas piqués des vers et que le film de Gérard Courant, une vélographie, est un essai autobiographique construit autour de son rapport au cyclisme. Le déclencheur en est la proposition qui lui est faite d'assister à l'étape depuis la voiture du Parisien-Aujourd’hui. Au cœur de la course. Le film organise la masse de souvenirs, d'informations et de réflexions sur le cyclisme comme sur le cinéma que ce projet déclenche en lui. Gérard Courant n'est pas un réalisateur ordinaire. Le mot filmeur me semble lui convenir bien. Sa caméra, super 8 ou vidéo, est une extension naturelle de sa main et de son œil. Il filme tout. Sa désormais célèbre collection des Cinématons, ce sont plus de 2300 portraits filmés de gens, connus ou pas, qu'il a rencontré. Il filme les villes où il a vécu, les rues de son enfance, les cinémas qui ont projeté ses films, les vues depuis les chambres d'hôtel où il est passé, une procession dans un petit village de l'Ardèche pendant 24 années. Tout. Il y a chez lui quelque chose que les cinéphiles, et les collectionneurs en général, connaissent bien : le côté compulsif, souvent maniaque, de celui qui classe, compile, dresse des listes, rempli des dossiers et des classeurs. Une démarche systématique, passionnée, qui vise, dirons nous, au contrôle de l'univers. Chambéry – Les Arcs, une vélographie de Gérard Courant est un film de forme plus classique dans lequel l'auteur se met en scène avec sa double passion pour le vélo et le cinéma. Il ouvre un grand cahier contenant des articles de revues et de journaux soigneusement collées, comme le faisait le pasteur Playfair dans The quiet man (L'homme tranquille – 1952) de John Ford. A ses classeurs bien alignés correspondent les rayonnages plein de boites de films super 8. Il rencontre ses amis, cyclistes et cinéastes à la fois, tels Serge Poljinsky ou Luc Moullet (qui nous raconte une ahurissante histoire d'engourdissement), et il filme la veuve de Jacques Anquetil, Janine, comme une actrice italienne âgée (quels yeux ! quelle voix !). Le récit plonge dans les racines de l'enfance. Les premières courses vues sur les premières télévisions, les premières revues achetées, la lecture de l'Equipe, les collections de photographies, les premières rencontres avec les idoles, les rois de la petite reine. Des hommes, des dates, des succès et des échecs. Du courage et de la douleur. Des chef d'œuvres. Faire un film, faire une course, le film se nourrit de cette rencontre. La séquence avec Serge Poljinsky m'a beaucoup touché. Le cinéaste de La ville est à nous (1976) tient un discours très fort sur le vélo comme école de qualités nécessaires à un cinéaste. Poljinsky et Courant discutent assis sur la piste de la Cipale, le vélodrome du bois de Vincennes qui voyait l'arrivée du Tour de France entre 1968 et 1974 et où, cinq fois, Eddy Merckx signa sa victoire. Enfant j'avais assisté à l'une de ces arrivées mythiques et si j'ai oublié les détails, j'ai toujours gardé quelque chose de l'ambiance. Courant filme l'endroit, vert, paisible, presque hors du temps. La nostalgie camarade ! Tout cet ensemble est vif et drôle. L'une des forces du travail de Courant est son rapport au temps. Le principe profond de son travail, c'est celui de la collection de fragments de temps. Portraits de gens, de couples, de rues, de maisons, il capture des étincelles d'éternité. C'est leur abondance qui finit par faire sens. Et ces fragments nourrissent d'autres œuvres. Ici, qu'il rencontre le journaliste Pierre Vavasseur ou Alain Riou, pour une sortie à vélo, et s'intercale leur Cinématon. Il a recours à ses propres archives et s'amuse à en créer de fausses, se filmant en train de projeter les films. Cette vélographie, c'est un peu la compilation de ces fragments de temps reliés à la passion cycliste, construisant le portrait de l'artiste au guidon. La seconde partie du film voit se rejoindre le temps du film et le temps de son auteur. Récit de l'ascension du col du col de la Madeleine et du Cormet de Roselend en compagnie d'Alain Riou et du chien Raoul, histoire de se préparer au grand jour. Cette partie rappelle par son atmosphère, la fiction en moins, le Parpaillon (1993) de l'ami Moullet. Considérations techniques, géographiques, historiques, philosophiques au rythme du pédalier. Arrive enfin le grand moment et la fameuse étape qui se conclut par une rencontre avec tous les coureurs qui furent les héros de l'enfance du réalisateur : Henry Anglade, Jean Stablinski et l'inamovible Raymond Poulidor, authentiques légendes. Sous une pluie fine et un ciel gris, de parapluie en parapluie, Gérard Courant passe de l'un à l'autre, autant de fragments de la grande histoire du vélo, quelque peu surpris de voir débarquer cet homme aux souvenirs précis qui les ramène à leurs temps de rois de la route. Émouvant, même si vous êtes plutôt football. (Vincent Jourdan, Inisfree Hautetcourt, 15 janvier 2011) Je crois que l'intervention de Poljinsky est capitale, Courant parle autant de cinéma (comme réalisateur et comme cinéphile) que de vélo. Un peu comme la danse chez Powell...) (Vincent Jourdan, Inisfree Hautetcourt, 18 janvier 2011) Chambery-Les Arcs laisse un sentiment très semblable. C'est une "vélographie", une ode au cyclisme composée sur le mode de l'alternance chapitrée de souvenirs d'enfance de Courant, au temps des Tours de France des années Anquetil-Poulidor, classeurs et coupures de presse à l'appui, et de rencontres avec d'autres passionnés de vélo. Cette petite chaîne constituée tend vers un point : le suivi, en voiture autorisée, de l'étape de montagne entre Chambéry et Les Arcs lors du Tour 96. Une dizaine de chapitres découpe le documentaire mais je l'ai vu comme un film en deux parties. La première n'est pas désagréable du tout mais m'a paru pâtir de son aspect rudimentaire (qui, ailleurs, peut servir très favorablement le cinéma de Courant) et être un peu forcée dans les petites saynètes mettant en scène le cinéaste et ses amis journalistes Pierre Vavasseur (qui l'invite à suivre la fameuse étape dans la voiture du Parisien) et Alain Riou (à qui il lance le défi de monter, ensemble, au moins deux des trois cols au programme des coureurs). Comme tout passionné, Gérard Courant raconte la petite et la grande histoire du vélo, nous abreuve d'anecdotes et va jusqu'à rencontrer Mme Janine Anquetil pour en placer une nouvelle. Amateur moins inconditionnel (du genre à ne regarder que quelques étapes de montagne chaque année), je me suis retrouvé là dans la position ambigüe de celui qui se retrouve face à un grand collectionneur : à la fois intéressé et un brin perplexe. En fait, j'ai tiré la conclusion que cette partie m'a laissé insatisfait pour une raison simple : le manque d'images illustrant les exploits racontés. Je me suis retrouvé dans le même état de frustration que le petit Courant devant patienter quelques années chez ses parents sans télévision. Mais tout à coup, ces images arrivent. Pas exactement, celles attendues, mais celles des ascensions successives par la paire Courant-Riou du Col de la Madeleine et du Cormet de Roselend. Et c'est une bouffée d'air frais... Courant bascule en quelque sorte de l'essai au reportage et nous intéresse, à notre grande surprise, plus dans ce registre. La double montée, longue, étirée, se vit comme une étape du tour : efforts, suspense, caprices météorologiques, informations chiffrées, impondérables (glorieuse incertitude du sport : le chien sans collier Raoul va-t-il faire chuter l'un des deux amis ?)... Ensuite, nous retrouvons Gérard Courant au "Village du Tour", au matin de l'étape, en train d'interroger quelques anciens champions croisés au hasard. Ici, le goût de l'anecdote provoque le dialogue, qui en devient extrêmement vivant. Notre plaisir est alors de guetter les réactions de chacun. Peu après, Chambéry-Les Arcs se termine par des bribes de l'étape vue de la voiture du Parisien... dans le brouillard, ce qui aide à clore le film sur une jolie tonalité. (Édouard Sivière, Le Blog Nightswimming, 28 février 2011) L'ami Courant m'annonce qu'il part présenter son film Chambéry-Les Arcs dans un festival intitulé "Cinéma et vélo".
J'y participerais volontiers, car je pédale pas mal moi-même.
Mais dans la choucroute. (Vincent Nordon, Blog de la Cinémathèque de Bourgogne-Jean Douchet, 17 mai 2011) J'écoutais hier lors de l'étape du Tour de France Saint-Paul-Trois-Châteaux-Gap (le pays-même de Luc Moullet) le commentaire d'un journaliste sur la position d'un des coureurs : "En montagne, il garde le dos droit", disait le commentateur. Or on sait que l'ami Courant prise particulièrement cette position (au vélo, et ailleurs). Posture paradoxale, courageuse. Montagnarde et fière. Courant n'est pas un homme de plaines. Ni de conversations mondaines. Encore moins de roman familial. C'est un acharné. (Vincent Nordon, Blog de la Cinémathèque de Bourgogne-Jean Douchet, 20 juillet 2011) Commençons tout d'abord par la réédition en DVD de son beau « documentaire » Chambéry-Les Arcs consacré à la passion du cinéaste pour le vélo. Si je mets des « guillemets » au terme documentaire, c'est parce que le film est davantage une flânerie qui tient autant de la fantaisie sportive que du journal intime. Même ceux qui n'entendent rien aux joies de la « petite reine » (c'est mon cas) trouveront un grand plaisir à cet autoportrait d'un passionné obsédé par l'idée d'archiver les moindres traces de son existence (en ce sens, Chambéry-Les Arcs est une sorte de prolongement « narratif » des Cinématons) (Docteur Orlof, Le Blog du Docteur Orlof, 11 novembre 2011) Gérard Courant n’est pas un réalisateur ordinaire. Quoique relativement peu connu du grand public, son œuvre est impressionnante et possède de nombreuses ramifications. Véritable homme-caméra, en Super 8 ou en vidéo, il filme tout. Sa vaste filmographie comprend des carnets filmés, de multiples archives, des fictions, des documentaires et de l’expérimental, souvent déclinés en séries. Il filme les villes où il a vécu, les rues de son enfance, les cinémas qui ont projeté ses films, les vues depuis les chambres d’hôtel où il est passé, une procession dans un petit village de l’Ardèche pendant 24 années. Tout. Son travail le plus fameux, la célèbre collection des Cinématons, ce sont 2440 (au 28 novembre 2011) portraits filmés de gens, connus ou pas, qu’il a rencontrés. Comment approcher cet univers ? Peut-être par les formes les plus classiques. Rendons grâces aux éditions de l’Harmattan qui proposent une édition DVD de Chambéry - Les Arcs, documentaire de 1996 autour de la double passion de Gérard Courant pour le vélo et le cinéma. Précisons d’emblée que Chambéry - Les Arcs est une étape du tour de France 1996 avec trois cols pas piqués des vers et que le film de Gérard Courant, une vélographie, se présente comme un essai autobiographique construit autour de son rapport au cyclisme. Le déclencheur en est la proposition qui lui est faite d’assister à l’étape depuis la voiture du Parisien-Aujourd’hui. Au cœur de la course. Le film organise la masse de souvenirs, d’informations et de réflexions sur le cyclisme comme sur le cinéma que ce projet déclenche en lui. l’auteur se met en scène dans une forme ouverte et accueillante. Il nous fait pénétrer chez lui, ouvre un grand cahier contenant des articles de revues et de journaux soigneusement collées, comme le faisait le pasteur Playfair dans The Quiet Man (L’Homme tranquille 1952) de John Ford. À ses classeurs bien alignés correspondent les rayonnages plein de boîtes de films Super 8. Il rencontre ses amis, cyclistes et cinéastes à la fois, tels Serge Poljinsky ou Luc Moullet (qui nous raconte une ahurissante histoire d’engourdissement), et il filme la veuve de Jacques Anquetil, Janine, comme une actrice italienne âgée (quels yeux ! quelle voix !). Le récit plonge dans les racines de l’enfance. Les premières courses vues sur les premières télévisions, les premières revues achetées, la lecture de l’Équipe, les collections de photographies, les premières rencontres avec les idoles, les rois de la petite reine. Des hommes, des dates, des succès et des échecs. Du courage et de la douleur. Des chefs-d’œuvre. Faire un film, faire une course, le film se nourrit de cette rencontre. La séquence avec Serge Poljinsky, le cinéaste de La Ville est à nous (1976), en est le symbole. Filmée sur la piste de la Cipale, le vélodrome du bois de Vincennes qui voyait l’arrivée du tour de France entre 1968 et 1974 et où, cinq fois, Eddy Merckx signa sa victoire. Courant filme l’endroit, vert, paisible, presque hors du temps, tandis que Polkinsky tient un discours très fort sur le vélo comme école de qualités nécessaires à un cinéaste. Tout cet ensemble est vif et drôle. L’une des forces du travail de Courant est son rapport au temps. Le principe profond de son travail, c’est celui de la collection de fragments de temps. Il capture des étincelles d’éternité. C’est leur abondance qui finit par faire sens. Et ces fragments nourrissent d’autres œuvres. Ici, qu’il rencontre le journaliste Pierre Vavasseur ou Alain Riou, pour une sortie à vélo, et s’intercale leur Cinématon. Il a recours à ses propres archives et s’amuse à en créer de fausses, se filmant en train de projeter les films. Cette vélographie, c’est un peu la compilation de ces fragments de temps reliés à la passion cycliste, construisant le portrait de l’artiste au guidon. La seconde partie du film voit se rejoindre le temps du film et le temps de son auteur. Récit de l’ascension du col de la Madeleine et du Cormet de Roselend en compagnie d’Alain Riou et du chien Raoul, histoire de se préparer au grand jour. Cette partie rappelle par son atmosphère, la fiction en moins, le Parpaillon (1993) de l’ami Moullet. Considérations techniques, géographiques, historiques, philosophiques au rythme du pédalier. Arrive enfin le grand moment et la fameuse étape qui se conclut par une rencontre avec tous les coureurs qui furent les héros de l’enfance du réalisateur : Henry Anglade, Jean Stablinski et l’inamovible Raymond Poulidor, authentiques légendes. Sous une pluie fine et un ciel gris, de parapluie en parapluie, Gérard Courant passe de l’un à l’autre, autant de fragments de la grande historie du vélo, quelque peu surpris de voir débarquer cet homme aux souvenirs précis qui les ramène à leurs temps de rois de la route. Émouvant, même si vous êtes plutôt football. (Vincent Jourdan, Fiches du cinéma, décembre 2011) Je faisais part de mon souhait de voir ce film dès que l’occasion se présenterait, ici dans le post portant sur trois Carnets filmés. Ce fut donc une surprise tout à fait agréable que de découvrir, pas plus tard qu’hier dans la nuit, la présence de Chambéry-Les Arcs sur la chaîne YouTube consacrée aux films du cinéaste. Autant dire que je me suis précipité sur une vision illico presto de ce film assez attendu de ma part depuis le temps qu’il m’intriguait, éh éh. Un vrai petit régal. Autoportrait du cinéaste en passionné de cycliste, le film parle de sa passion du vélo mais aussi de cinéma. J’apprécie beaucoup le travail cinématographique établissant des liens vélo/cinéma, et cela trouve écho dans d’autres Carnets filmés, tel que Maurice Izier, coureur cycliste professionnel dans les années 1960, réalisé en 2006, où d’ailleurs l’introduction du critique Patrick Leboutte est à ce titre fort enthousiasmante. A travers Chambéry-Les Arcs, Gérard Courant met en avant des parallèles cinéma/vélo et nous permet également de partager la passion vélo de cinéastes et/ou critiques tels qu’Alain Riou ou Luc Moullet. Voilà pourquoi ce film, au-delà du cyclisme, peut intéresser et plaire aux non passionnés de vélo. Car comme déjà dit à propos d’autres Carnets filmés, il s’agit aussi d’approcher ici une certaine folie passionnelle. C’est bel et bien une folie qui a contaminé le cinéaste. Ses archivages, par exemple, des courses cyclistes, sont terribles; comment ne pas retrouver une correspondance avec sa pratique cinématographique et sa folie qui va de pair à filmer continuellement, répertorier des lieux (gares, rues…), croiser des films avec des Carnets filmés établissant des prolongements (au moins trois ou quatre Carnets filmés recoupent ce film par exemple, mais c’est le cas aussi, en 2006, telle la rencontre avec Benjamin Chanut qui intervient le même jour semble-t’il que la rencontre dans le cadre de “Territoires, regards croisés” à Valence) . Et encore une fois l’imaginaire lié au vélo tient une très bonne place; on voit comme les passionnés rencontrés dans le film mettent des mots, des sensations, de soi finalement, dans les événements de course du cyclisme. Tout ce qui tourne autour d’Anquetil ainsi relèvent de la mort : son fameux “bluff”, son côté bourreau vis à vis de Poulidor qui est présenté ici et là comme un faire valoir nécessaire au mythe Anquetil… Les interprétations de course et les “si” font encore jaser des décennies après, ainsi les rencontres au Village du Tour de France avec Poulidor, etc : Gérard Courant y soulève des questionnements qui l’ont hanté et se demande toujours “si” et “si”… On se rend compte à quel point le cyclisme et ses champions dépassent le seul chrono et l’exploit physique. Et ô combien la “conclusion” du film est superbe : reprise de propos superbes d’Olivier Dazat, qu’on peut retrouver en intégral dans le Carnet, Olivier Dazat ou l’amour du vélo (1996). A l’occasion de ce film, Gérard Courant a donc eu aussi la possibilité de pratiquer à vélo, avec Alain Riou, une partie d’une étape de haute montagne du Tour de France d’alors. Il est assez plaisant de voir comment les deux amis sont filmés : quelques échos aux traitements télévisuels des courses professionnelles (un prolongement est disponible sur YouTube : le Carnet Coude à coude). Mais ça donne un charme qui contraste avec la médiatisation. Il est intéressant de voir comme la pratique amateur se fait aussi en référence aux mythes cyclistes. Pour ma part, ayant quelque peu pratiqué la montée de cols où sont passées de nombreuses étapes du Tour de France (avec son lot d’imaginaires, images, souvenirs que j’y mets), je n’ai jamais pu m’empêcher, malgré mes 5-6 km/h de moyenne dans les moments les plus difficiles, de me situer mentalement en référence à tout un monde; ainsi le col de l’Izoard où les exploits de Coppi par exemple, lors du passage de la Casse déserte, me hantent l’esprit. Mais ne nous trompons pas : ce n’est pas tant l’exploit terre à terre des grands du vélo qui s’installe dans ce cadre de référence; il faut peut-être pratiquer pour se rendre compte à quel point une montée est une véritable expérience de dépassement de soi, quasi “métaphysique” parfois. En début de film, il y a d’ailleurs ce cinéaste, ancien professionnel (jusque 24 ans) qui compare aussi cinéma et vélo dans sa dimension de dépassement du réel terre-à-terre, véritable épreuve de confrontation à la vie. Le film ne manque pas d’humour non plus, et le passage avec Luc Moullet est très drôle, à l’occasion d’un récit de montée d’un col… en solitaire. Car au-delà du comique de situation, Moullet témoigne de l’aspect personnel d’un parcours de vélo; on est seul face à la route (même dans un Tour de France quelque part, malgré les coéquipiers, la caravane publicitaire, les médias, le public…), on peut certes construire dans sa tête un scénario, ou compter des tour Eiffel (Alain Riou), ou réaliser des additions de plaques d’immatriculation… il est toujours question d’un vécu très personnel, parfois épique (l’épisode Luc Moullet), qui renvoie à des “exploits” de ma part fort chargés en anecdotes qui me hantent encore l’esprit – parfois drôles mais aussi plus “dramatiques”, notamment lorsque je crus une fois tomber dans le ravin pour de bon, ou encore me faire écraser par une voiture lors d’une chute, ou coucher dehors à cause d’une fringale qui me pénalisa un trajet “héroïque”). C’est dans tout cela que j’apprécie le traitement de Gérard Courant du vélo : il rend palpable la rencontre du cyclisme à l’humain, où on y met du soi, où on est pas extérieur et simple spectateurs. En cela c’est comme le cinéma : nous ne sommes pas réduits à des spectateurs du cinéma, notre imaginaire, notre intériorité, notre “réel” rencontrent (parfois) le film. Tout cela est très vivant, et une dimension de rencontre échappe à la passivité et option de consommation très en vogue à la fois dans le traitement médiatique du vélo (mais aussi d’autres sports, tel que le football) mais aussi dans ce que devient le cinéma, objet et non plus quelque chose de vivant, qui se partage, qui se vit, qui permet l’expression de l’imaginaire, qui interagit avec la vie aussi. Que Gérard Courant incruste aussi dans ce Chambéry-Les Arcs des séquences cinématographiques faussement tournées dans le passé expriment bien aussi les souvenirs hantés par le cyclisme. Il y a ici une superbe articulation avec des plans tournés aujourd’hui où ne reste que la parole pour garder vivant un souvenir : notamment lorsqu’il pose sa caméra sur une rue et s’y remémore un passage du Tour dans son enfance (et sans maillot jaune visible, car caché d’un k-way par temps de pluie). Un aspect qui dépasse le vélo une fois de plus : la cohabitation passé/présent/souvenirs/imaginaire exprimés cinématographiquement; il est fréquent dans ses autres Carnets filmés que se superposent des images anciennes (en “surimpression”) au récit. Plus je me confronte à ses Carnets filmés et à quelques films, donc, plus je perçois chez ce cinéaste un travail sur le temps : comment visualiser, par le biais du cinéma, ce temps (cohabitation passé/présent etc) qu’on ne peut pas matérialiser ? Un peu décousues toutes ces impressions personnelles de ce film, mais il va de soi que je me consacrerai sans doute de bonnes sessions, ces prochains mois, à l’oeuvre de Courant. (Citylightscinema, 13 juillet 2012) CAMPEON CICLISTA Pero lo que me gusta es el ciclismo. Cuando era pequeño, de mayor quería ser campeón ciclista. No ciclista: campeón ciclista. No quería ser un anónimo del pelotón sino un vencedor. Y luego, la vida decidió otra cosa y me conformé con otro oficio que, como la práctica de la carrera ciclista, no es uno cualquiera, el de cineasta. Entre paréntesis, cuando se habla de record para mis películas; por ejemplo, el de película más larga (Cinématon es el filme más largo jamás realizado por un cineasta –existe uno finlandés más largo, pero fue realizado por un colectivo) o el del número de películas realizadas me siento en sintonía con la mayoría de deportistas que pasan su vida intentando batir records. Puede analizarse mi carrera de cineasta como una voluntad perpetua de llenar un vacío, el de no haber llegado a ser un campeón ciclista. Toda mi vida de cineasta y todos mis filmes han intentado paliar esa carencia. He dedicado varias películas a la bici, sobre todo Chambéry-Les Arcs, une vélographie de Gérard Courant, en 1996. Lo más divertido de esta historia es que nunca había tenido un proyecto sobre el ciclismo hasta el día en que fui a una proyección privada de un filme realizado por un amigo sobre el escritor Henry Miller. En esa proyección conocí a alguien que era productor. Me preguntó muy amablemente a qué me dedicaba y yo le conté mis excursiones en bici por los Alpes y le hablé de nuestro club literario, Bicyclettre, que reunía escritores apasionados por el ciclismo. Nos reuníamos a menudo en un restaurante y sólo hablábamos de ciclismo, de las proezas de Fausto Coppi, Louison Bobet, Eddy Merckx, Jacques Antequil, Bernard Hinault, etc., ¡y nunca de literatura! Escribí el proyecto en un fin de semana, a pesar de que suelo dedicar varios meses o incluso años a escribir sólo uno. Un mes más tarde, ese productor cumplió su promesa y yo me encontraba rodando en París y en los Alpes. Hice la película, que es una autobiografía, Chambéry-Les Arcs, con el nombre de una etapa dantesca del Tour de Francia de 1996, aquella en la que Miguel Induráin se desmoronó en la subida y perdió sus últimas esperanzas de ganar el Tour de Francia por sexta vez. Lo cual habría sido, en aquel momento, el record. En esta película encuentro amigos que adoran el ciclismo, entre ellos el cineastas Luc Moullet –hay una secuencia muy divertida con él–, el escritor Olivier Dazat, el escritor y periodista Pierre Vavasseur, grand reportero del Parisien, y Alan Riou, crítico de cine del Masque et la Plume y del Nouvel Obs. Tras haber explicado a Alan Riou que iba a seguir la etapa del Tour en un coche oficial, hicimos la apuesta de recorrer en bici la misma etapa de montaña un día o dos antes de los ciclistas, y la hicimos casi entera. No llegamos hasta Arcs porque no teníamos tiempo, pero subimos el Col de la Madeleine y el Cormet de Roselend. Dos días después, fui primero con mi pequeño equipo técnico a Chambéry, el pueblo de salida, donde encontré a algunos campeones que recordaba de mi infancia: el antiguo campeón mundial Jean Stablinski, Raymond Poulidor, con quien tuve una conversación surrealista donde le contaba cada etapa del famoso Tour de 1964 que él había estado a punto de ganar. Le expliqué de dónde habría podido sacar algunos segundos y ganar aquel Tour de Francia que le abría los brazos y en el cual él no fue más que delfín. Conocí también a Henry Anglade, que era un gran campeón de esta misma época (había sido segundo en el Tour de Francia de 1959). Luego seguí la etapa en el coche del Parisien. Hice un filme de 1 hora y 15 minutos, que salió en octubre de 2011 en DVD en L’Harmattan. Fueron dos semanas de rodaje formidables durante las cuales fui pagado para hacer ciclismo. ¡Como un profesional! ¡Un sueño de infancia! (Declaraciones recogidas por Nicolas Bohler en Buenos Aires el 21 de abril de 2012. Traducido del francés por Miguel Armas. elumiere.net) CHAMPION CYCLISTE Mais mon dada, c’est le vélo. Lorsque j’étais enfant, je voulais devenir champion cycliste. Pas coureur cycliste : champion cycliste. Je ne voulais pas être un anonyme du peloton mais un vainqueur. Et puis, la vie en a décidé autrement et je me suis rabattu sur un autre métier qui, comme la pratique de la course cycliste, n’en pas un, celui de cinéaste. Entre parenthèse, quand on parle de record pour mes films : par exemple, de film le plus long (Cinématon est le film le plus long réalisé par un cinéaste – il existe un film finlandais plus long mais il a été réalisé par un collectif) ou du nombre de films réalisés je me sens en symbiose avec la plupart des sportifs qui passent leur vie à essayer de battre des records. On peut analyser ma carrière de cinéaste comme une volonté perpétuelle de combler un vide, celle de ne pas avoir été un champion cycliste. Toute ma vie de cinéaste et tous mes films ont tenté d’essayer de pallier ce manque. J’ai consacré plusieurs films au vélo. Notamment Chambéry-Les Arcs, une vélographie de Gérard Courant, en 1996. Le plus amusant dans l’histoire, c’est que je n’avais jamais eu de projet sur le vélo jusqu’au jour où je suis allé à une projection privée d’un film réalisé par un ami cinéaste sur l’écrivain Henry Miller. Et à cette projection, j’ai rencontré une connaissance qui était producteur. Il m’a demandé fort aimablement ce que je faisais et je lui ai raconté mes randonnées cyclistes dans les cols des Alpes et je lui ai parlé de notre club littéraire, Bicyclettre, qui rassemblait des écrivains qui étaient passionnés par le vélo. Dans ce club, on se rassemblait régulièrement dans un restaurant et on ne parlait que de vélo, des exploits de Fausto Coppi, Louison Bobet, Eddy Merckx, Jacques Anquetil, Bernard Hinault, etc. et jamais de littérature ! Puis ce producteur m’a demandé d’où venait cette passion et j’ai évoqué mon grand-père qui avait été coureur cycliste dans sa jeunesse et qui m’avait initié à cette passion. Il m’a fait parler pendant un bon moment et puis, soudain, il me dit que mon histoire mériterait d’être filmée et que si ça m’intéressait, je pouvais lui proposer un projet sur ce sujet qu’il pourrait produire. J’ai écrit un projet en un week-end alors que je mets parfois de longs mois ou des années pour en écrire un. Un mois plus tard, ce producteur avait tenu sa promesse et j’étais en tournage à Paris et dans les Alpes. J’ai donc fait ce film, qui est une autobiographie, Chambéry-Les Arcs, du nom d’une étape dantesque du Tour de France 1996, celle où Miguel Indurain s’effondra dans la montée des Arcs et perdit ses derniers espoirs de gagner le Tour de France pour la 6ème fois. Ce qui eut été, à l’époque, le record. Dans ce film, je rencontre des amis qui adorent le vélo, dont le cinéaste Luc Moullet – il y a une séquence très drôle avec Luc Moullet –, l’écrivain Olivier Dazat, l’écrivain et journaliste, Pierre Vavasseur, grand reporter au Parisien, et Alain Riou, critique de cinéma du Masque et la Plume et du Nouvel Obs. C’est après avoir expliqué à Alain Riou, que j’allais suivre l’étape du Tour dans une voiture officielle, que nous avons fait le pari de faire à vélo cette même étape de montagne un jour ou deux avant les coureurs, et nous l’avons presque entièrement faite. Nous ne sommes pas allés jusqu’aux Arcs parce que nous n’avions pas assez de temps, mais on a monté les deux cols d’avant, bien plus durs que les Arcs, le col de la Madeleine et le Cormet de Roselend. Le surlendemain, je suis d’abord allé avec ma petite équipe technique au village-départ à Chambéry où j’ai rencontré quelques champions de mon enfance : l’ancien champion du monde Jean Stablinski, Raymond Poulidor, avec qui j’ai eu une longue conversation à bâtons rompus, une conversation surréaliste où je lui racontais chaque étape du fameux Tour 1964 qu’il faillit gagner. Je lui expliquais où il aurait pu grignoter des secondes et gagner ce Tour de France qui lui tendait les bras et qu’il termina deuxième. J’y ai rencontré aussi Henry Anglade, qui était un grand champion de cette même époque (il avait terminé deuxième du Tour de France 1959). Puis j’ai suivi l’étape dans la voiture du Parisien. Cela fait un film d’1 heure 15 minutes, qui est sorti en octobre 2011 en DVD chez L’Harmattan. Ce furent deux semaines de tournage formidable durant lesquelles j’étais payé pour faire du vélo. Comme un professionnel ! Un rêve d’enfance ! (Propos recueillis par Nicolas Bohler à Buenos Aires le 21 avril 2012, elumiere.net) Invité à suivre l’étape de montagne Chambéry-Les Arcs du Tour de France 1996, suite à un pari avec Alain Riou, Gérard Courant décide de faire à vélo cette même étape quelques jours avant les coureurs. Commence alors pour le cinéaste un parcours initiatique « fait de réminiscence de son enfance et de rencontres insolites et drôles ». Un parcourt au cours duquel il réalise un vieux rêve, celui de réaliser un film sur sa passion. Véritable autobiographie, rendue possible par le prisme du cyclisme, le cinéaste y raconte comment enfant, il couvrait ses livres d’école de classements d’étapes. Œuvre très personnelle, Gérard Courant se livre pleinement et directement à la caméra. Mais il livre également un documentaire sur le Tour de France. Son film n’échappe pas à l’ambivalence des œuvres du cinéaste, à savoir cette résonance entre autobiographie et documentaire. Le film s’organise autour de cette masse de souvenirs, d’informations et de réflexions sur le cyclisme mais surtout sur le cinéma. Le cinéma qui est chez Gérard Courant un art de vivre, la caméra chez ce dernier est une forme d’extension naturelle de son œil. Il filme tout. Les villes où il a vécu, les rues de son enfance, les cinémas où sont projetés ses films, les vues depuis les chambres d’hôtel où il est passé… Gérard Courant dresse, compile tous ses souvenirs dans ses films. Dans cette démarche compulsive du collectionneur, Gérard Courant semble vouloir contrôler sa mémoire. L’auteur se met ici en scène dans ses propres souvenirs, où passion pour le vélo et cinéma cohabitent. Au fil des rencontres, Gérard Courant entrouvre un peu plus la boîte aux souvenirs, le replongeant dans les racines de son enfance. La seconde partie du film voit se rejoindre le temps de la narration filmique et le temps de son auteur. Outre l’évocation de ses souvenirs qui le font le temps d’un travelling à la main dans les rues de Dijon, Gérard Courant joue avec le vrai et le faux. Il se sert du support Super 8 (du film amateur), pour évoquer des souvenirs, de famille alors qu’ils ne sont que des reconstitutions jouées. Par instants, la fixité de la caméra renforce la conscience des limites de l’image, par extension celle du hors-champ. D’une manière générale ce dernier à tout autant d’importance que le champ d’action de la caméra que se soit aussi bien d’un point de vue visuel que d’un point de vue sonore. À nouveau, Gérard Courant nous propose un film sous-entendu par l’idée de conservation, de la fixation d’un présent qui pourrait éclairer un futur. Mais c’est avant tout un film contemporain, qui malgré la modestie de sa forme nous fait partager de manière assez juste la petite et la grande histoire du cyclisme. Chambéry-Les Arcs soulève une question importante concernant l’autoportrait. Comme dans la peinture, il y a des autoportraits qui sont des autoportraits et d’autres qui s’en approchent dans la volonté même du dispositif mais qui, une fois la réalisation, s’en éloignent. Comme nous avons déjà pu le constater l’autoportrait n’est pas à confondre avec l’autoreprésentation. Mais qu’est ce que l’autoreprésentation ? Au premier abord il s’agit de se représenter soi-même. La représentation cinématographique prend corps à plusieurs niveaux. D’abord, par le filmage puis par le montage. Contrairement à la production commerciale et générale du cinéma, Gérard Courant opère et dirige à la fois le filmage et le montage. Et de ce fait dans cette simple démarche, le cinéaste se représente, donne à voir sa représentation. Dans l’autoportrait, la démarche est la même. Le film autoportraitique est un film qui se définit par le portrait du cinéaste par le cinéaste lui-même. Gérard Courant ne se représente pas en réalisateur dans Chambéry-Les Arcs, il se représente en cinéaste passionné de cyclisme. Il n’est pas question d’interpréter soi-même son propre rôle, mais de se filmer. Telle est la volonté du cinéaste, comme un film de « famille » nous rapporte un témoignage, d’un instant, d’un moment, d’une expérience de sa vie. Nous ne retrouvons pas chez Gérard Courant la double posture : énonciateur/énoncé, sujet/objet. La question de savoir où commence la part autobiographique dans l’œuvre de Gérard Courant n’est pas nécessaire pour appréhender l’Œuvre du cinéaste. Étudier les films de Gérard Courant, c’est considérer le film comme un phénomène. Un phénomène agissant sur l’esprit du spectateur. La compréhension du film passe par la mémoire du spectateur. La projection d’un film et plus particulièrement la projection d’un film de Gérard Courant est une situation expérimentale, dans la mesure où le spectateur fait appel à son expérience, à sa mémoire pour la compréhension du film. Il s’agit dans le cinéma de Gérard Courant « d’une expérience nouvelle du temps et de la mémoire qui, à elle seule, forme un être expérimental ». Il est intéressant de voir que dans le travail de Courant, la mémoire est comprise comme un ensemble de relations temporalisées et structurées. Une telle mémoire est avant tout un processus. Processus dans lequel cohabitent mémoire du cinéaste, du spectateur et du film. (Estelle Pajot, L’oeuvre filmée de Gérard Courant, Université de Bourgogne, UFR Sciences Humaines et Sociales, Département Histoire de l’Art et Archéologie, sous la direction d’Isabelle Marinone, 2014) Gérard Courant me ferait presque aimer le vélo. (Béatrice Darnal, Facebook, 24 juillet 2016) Un vrai petit régal. Autoportrait du cinéaste en passionné de cycliste, le film parle de sa passion du vélo mais aussi de cinéma. J’apprécie beaucoup le travail cinématographique établissant des liens vélo/cinéma, et cela trouve écho dans d’autres carnets filmés, tel que Maurice Izier cycliste professionnel réalisé en 2006, où d’ailleurs l’introduction du critique Patrick Leboutte est à ce titre fort enthousiasmante. (Laurent Kluger, YouTube, 2016)
GÉRARD COURANT LE BIEN NOMMÉ
UN FILM DE LA RÉSURGENCE
PORTRAIT DU CINÉASTE EN CYCLISTE
PORTRAIT DE L'ARTISTE AU GUIDON
L'INTERVENTION DE POLJINSKY EST CAPITALE
LA PETITE ET LA GRANDE HISTOIRE DU VÉLO
CINÉMA ET VÉLO
COURANT EST UN ACHARNÉ
UN PROLONGEMENT NARRATIF AUX CINÉMATONS
UNE VÉLOGRAPHIE DE GÉRARD COURANT
COMMENT VISUALISER CE TEMPS QU'ON NE PEUT PAS MATÉRIALISER
Luego, ese productor me pidió de donde venía esa pasión y le hablé de mi abuelo, que había sido ciclista en su juventud y que me había iniciado en esa pasión. Me hizo hablar durante un buen rato y luego, de repente, me dice que mi historia merecería ser filmada y que si me interesaba, podía proponerle un proyecto sobre ese tema que él mismo podría producir.
PERCEPTION ET MÉMOIRE
AIMER LE VÉLO
ENTHOUSIASMANT
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