Année : 1999. Durée : 1 H 22'
Fiche technique :
Réalisation, image, conception sonore, montage : Gérard Courant.
Production : Gérard Courant, Les Amis de Cinématon.
Interprétation : Boris Lehman, Amal Kharrat, Antoine-Marie Meert, Laurent d’Ursel, Gérard Courant, Dragoslava Koprivica, Daniel S. Schiffer, Alain Paucard, Frédéric Dutourd, Philippe Pastorino, Marc Cohen, Pierre Chalmin, Roland Castro, Jean-Marie Audigier, Odile Courant, Iris Czarnecki, Louison Czarnecki, Katja Sambeth, Joseph Morder, Dominique Noguez, Isabelle Fermon, Gérard Louis-Clément, Arnaud Mathey-Dreyfus, Ann Vorms, Jean-Daniel Bécache, Françoise Michaud, Marcel Hanoun, Estelle Courtois, Ann Arnold, Arnaud Boland, Éric Borg, Frédéric Bouglé, fils Londeix, Hugues Deltell, Claire Dumazé, Olga Jirouskova, Irène Lambelet, Georges Londeix, Bénédicte Mallet, Pierre Martot, Pierre Merejkowsky, Jean-Claude Moireau, Dominique Païni, Guy Pezzetta, Yves-Marie Rollin, Salah Sermini, Gérard Tallet, Raphaël Bassan, Mara Pigeon, Gwennaël Breës, Zouzou, Jackie Raynal, Serge Bard, Jacques Baratier, Caroline Deruas, Esther Garrel, Léna Garrel, Philippe Garrel, Garcia, Jacques Boissonnas, Laura Duke Condominas, Serge T, Caroline de Bendern, Sally Shafto, Jean-Paul Sarré, Catherine Baratier, Alain Dister, Patrick Deval, Ester de Miro, Marcel Mazé, Altinay Kislali, Camille Aubaude, Martin Gambier, Patrick Javault, Tatiana Kecojevic, Pierre Laudijois, Martin Laudijois, Dominique Laudijois, Robert Kramer (extrait de son Cinématon), Pip Chodorov.
Tournage : Bruxelles (Belgique), Gand (Belgique), Paris (France), le Vivarais (France), Burzet (France), Jarnioux et le Beaujolais (France), Resson (France), Ankara (Turquie), Eskisehir (Turquie), Strasbourg (France), Nantes (France).
Format de tournage : Super 8.
Pellicule : Kodachrome.
Format de diffusion : Vidéo.
Cadre : 1,35.
Procédé : Couleur.
Collection publique : BnF (Bibliothèque nationale de France), Paris (France).
Principaux lieux de diffusion :
-Forum International du Jeune Cinéma, Berlin (Allemagne) 2007.
-Gulf Film Festival, Dubaï (Émirats Arabes Unis) 2011.
-Site YouTube, 2012.
Dédicace : Le film est dédié à Boris Lehman.
Derrière la nuit est l'épisode qui recouvre la période du 1er janvier 1999 au 31 décembre 1999 de mes Carnets filmés.
On y trouve certains thèmes récurrents : les voyages, les paysages désolés (en particulier du Vivarais), l'amour du Cinéma, le plaisir de déambuler dans les villes, les à-côtés de mes tournages (dans cet épisode, du Journal de Joseph M).
On y rencontre aussi les mêmes obsessions et les mêmes préoccupations : l'influence des saisons, la fascination des visages, le goût des couleurs, l'importance de la mémoire des lieux et des hommes.
Saint-Maurice et le bois de Vincennes, Bruxelles, Gand, Burzet, Ankara, Esquisehir, Paris, Resson, Strasbourg, Nantes, sont les lieux qui jalonnent Derrière la nuit. On y voit de nombreux personnages de mes films : Boris Lehman, Françoise Michaud, Joseph Morder, Dominique Noguez, Raphaël Bassan, Marcel Hanoun, Dominique Païni, Noël Godin, Philippe Garrel, Jackie Raynal, Alain Paucard, Pierre et Dominique Laudijois, Pip Chodorov, Robert Kramer, etc.
(Gérard Courant)
Some recurring (classic) themes: travelling, desolate landscapes, the pleasure of strolling through the city, to the sides of my shoots (Le Journal de Joseph M).
(G. C.)
Courant explique que ses Carnets filmés sont une manière de journal littéraire. En fait, on y trouve deux modèles apparemment contradictoires de carnets et de journaux.
Les Carnets filmés n’ont rien de commun avec Léautaud ou Edmond de Goncourt parce que ceux-là affirment, tempêtent quand Courant ne prend pas d’autre position que celle de la caméra (avec ou sans pied). Ce sont à la fois des carnets de croquis, des « petits riens des grands maîtres » – et, à ce jeu, Courant est un peintre ; je pense à ces vues du bois de Vincennes prises depuis son ancienne thébaïde – et des journaux littéraires, oui, mais qui se contentent de noter les rencontres, bref, un agenda concis, jamais sec pour autant, mais en fin de compte précis, du Benjamin Constant.
(Alain Paucard, 18/VII/2008)
Nous songions naïvement que le passage à l'an 2000 ne changerait rien, que le monde suivrait son cours paisiblement, sans réelles transformations. En replongeant dans le journal filmé que Gérard Courant a tenu au cours de l'année 1999, nous mesurons à quel point ce passé pourtant si proche (un peu plus de 20 ans) paraît désormais si lointain. Plusieurs signes ne trompent pas : les restaurants affichent leurs menus en francs, une vignette automobile collée sur un pare-brise permet de déterminer en quelle année nous sommes. Et même si on en aperçoit fugitivement un à la terrasse d'un café place Saint-Sulpice, personne n'est distrait pas son téléphone portable, cette laisse électronique qui constitue indéniablement l'un des pires fléaux de notre époque.
En 1999, Gérard Courant commençait à utiliser la vidéo pour réaliser ses films (Le Journal de Joseph M, dont on verra ici les à-côtés du tournage) mais il garde le format Super 8 pour ses « carnets filmés » et ses autres séries (en 2006, il tournera son dernier Cinématon dans ce format). L'image granuleuse du Super 8 accentue ce sentiment de voir un monde englouti et lointain. Il permet également au cinéaste d'affirmer son sens du montage et de la concision que n'auront plus forcément ses carnets tournés en vidéo. Non pas qu'ils ne soient pas intéressants (loin de là !) mais les infinies possibilités de tourner en continu l'ont poussé à revenir vers une esthétique Lumière et à tourner souvent de longues séquences (voir parfois des films entiers) sans aucune coupe, laissant advenir le Réel le temps d'un tour de lac ou d'une promenade dans les rues de Dijon ou de Lyon.
L'aspect impressionniste d'un carnet comme Derrière la nuit a un peu laissé la place à des dispositifs formels très forts (et souvent passionnants) qui peuvent aussi être un peu moins émouvants. Cela n'empêche pas pour autant Courant de nous offrir ici quelques moments expérimentaux, à l'image de cette splendide séquence où un feu d'artifice se transforme en un parfait ballet de formes abstraites digne d'un film de Norman McLaren ou Len Lye.
L'année 1999 fut riche pour Gérard Courant : séjours à Nantes, Strasbourg, en Belgique et en Turquie, tournage du Journal de Joseph M qui lui permet de retrouver de nombreux complices : Dominique Noguez, Boris Lehman, Marcel Hanoun, Françoise Michaud, Noël Godin, Mara Pigeon... En mai, il retrouve à Saint-Sulpice l'équipe de Zanzibar et cette réunion (dont il tirera un court-métrage) lui permet de filmer Garrel, Serge Bard, Marcel Mazé, Jackie Raynal, Zouzou...A l'instar de Jonas Mekas, le cinéaste filme à la fois toutes ces personnalités avec une certaine proximité mais il intercale des séquences plus intimistes, filmant la campagne du Beaujolais où il se rend pour rendre visite à sa sœur et son neveu ou encore les rues de Nantes et un bâtiment érigé par Le Corbusier. Comme chez Mekas, le montage est très « cut » et nous offre une vision impressionniste et lumineuse du monde comme il va, s'attardant aussi bien sur les visages (merveilleusement bien filmés) que sur des détails a priori anodins mais qui, avec la patine du temps, prennent une valeur essentielle (banderoles dans une manifestation contre l'intervention de l'OTAN en Yougoslavie, titres de presse – la mort de Robert Kramer - et couvertures de périodiques, etc.).
La référence à Mekas est d'autant plus vraie que Courant revient souvent sur les lieux de son enfance (Saint-Marcellin) et qu'il y a derrière cette volonté de fixer chaque instant de son existence un désir de retrouver une forme de « paradis perdu » que l'on peut deviner sur le visage de son tout jeune neveu.
Fin décembre de cette année 99, une grosse tempête traverse la France. Gérard Courant se rend au bois de Vincennes pour filmer les dégâts. Si la vie semble se poursuivre (une famille joue au ballon), ces images apocalyptiques d'arbres arrachés deviennent le parfait symbole d'un monde d'avant en train de disparaître. Et Derrière la nuit apparaît alors comme une tentative désespérée (et néanmoins apaisée) de sauver malgré tout quelques traces d'un passé si loin, si proche...
(Dr Orlof, Le journal cinéma du Dr Orlof, 14 février 2023)
Le film est visible sur YouTube dans une version légèrement différente que celle qui j'ai pu visionner (quelques scènes sont en en noir et blanc alors que je les ai vues en couleurs et sans la musique additionnelle)
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