Année : 1978. Durée : 3' 30
Fiche technique :
Réalisation, scénario, montage, image : Gérard Courant.
Production : K.O.C.K. Production, Gérard Courant.
Diffusion : Les Amis de Cinématon.
Tournage : août 1978 à Priay (France).
Format : Super 8 mm.
Pellicule : Revue.
Procédé : Couleur. Muet.
Première projection publique : le 19 novembre 1978, Festival International du Super 8 à Namur (Belgique).
Principaux lieux de diffusion :
-Galerie de l’Ouvertür, Paris (France) 1978.
-Ciné-Off au Festival du film, Cannes (France) 1979.
-Théâtre de Poche, Bienne (Suisse) 1983.
-C.A.C. Voltaire, Genève (Suisse) 1983.
-Atelier de Recherche Esthétique, cinéma Le Lux, Caen (France) 1983.
-Cinéma Studio 43, Paris (France) 1986.
-Cinémathèque Française, Paris (France) 1991.
-Site YouTube, 2018.
Prix, récompenses, distinctions :
-Prix Morlock, Festival International du Super 8, Namur (Belgique), 1978.
-Fait partie de la liste de 381 films, qrstafszdv, établie par judas2, site Letterboxd (Nouvelle-Zélande), 2021.
Est-ce un film ?
Je crois que ça bouge.
Suite à une vilaine entorse de la cheville, j'avais un pied dans le plâtre. Assis dans le jardin de la vieille maison familiale de Priay (près d'Ambérieu-en-Bugey), je lisais les écrits de Francis Picabia.
Euphorisé par leur force, vivifié par leur imagination, subjugué par leur don de provocation, de subtilité et de précision, je regardai devant moi, ébahi, et remarquai un mur recouvert de mousse aux couleurs jaunes, oranges, une mousse dorée qu'un soleil couchant éclairait de ses rayons horizontaux.
J'allais chercher ma caméra et je filmai ce mur d'un coup de pellicule, tenant (fixant) la caméra à la main. Le zoom au maximum de son avancée pour « agrandir » les détails et mieux faire apparaître le relief et les « accidents » de la mousse, la caméra – c'est inévitable – bougeait légèrement et le film reproduisit immanquablement ces légers tremblements amplifiés par le zoom, provoquant une insignifiante mouvance du cadre.
Que remarque-t-on dans cette image ? Une ambiguïté du représenté, quelque chose d'indéfinissable, un objet vidé de toute fiction, de toute narration, de toute représentation. Sans son.
Que demeure-t-il ?
Une image énigmatique.
L'Âge doré est un film sans fioriture. Mêlé à des films normaux, petits modèles fauchés des « grands » films abâtardis de l'industrie cinématographique, comme ce fut le cas lors de la première projection au Festival de cinéma de Namur, en Belgique, le film est une récréation, un temps d'arrêt pendant lequel un spectateur abruti et fatigué par des heures de projections de films peut se laisser aller, briser les interdictions relatives au Cinéma de Consommation Courante (le silence, l'action de fermer les yeux) sans que le film ne subisse quoi que ce soit de néfaste de ces actions intempestives.
Après six heures de projection continue de films normaux, cette séance a, par ses effets, libéré les pulsions, provoqué des réactions démesurées. Pendant la séance, un spectateur s'est soudainement mis à jouer de l'harmonica.
Le procédé de plan unique après le flot de Cinéma Normal Conventionnel fut ressenti comme un moment interminable d'autant qu'il s'y ajoutait de l'anxiété, de l'angoisse liées à l'incertitude et à l'ignorance, pour beaucoup, de la durée du film : « Combien de temps va-t-il (le plan, le film) durer ? »
Comme Rasage, L'Âge doré dépasse le concept de plan-séquence pour inaugurer celui de plan-film.
Cinéma de la paresse, cinéma du geste (et non pas du gestuel, cher à Michel Nedjar) : geste de filmer, geste de créer, L'Âge doré a pour fonction de libérer les spectateurs emprisonnés dans le Cinéma de Consommation Courante. Avec ce film, le spectateur prend un bain euphorisant. Il ne noie pas son regard dans le miroir de l'écran : il flotte sur la représentation.
(Gérard Courant)
Les deux prix Morlock (N.B. : du festival de Namur) ont été attribués par un jury de jeunes cinéastes et critiques français exigeants à L’Âge doré de Gérard Courant (France) en hommage à Francis Picabia, un hallucinant plan fixe de mousse dorée par les rayons du soleil couchant et Blockhaus Mia de Mara Pigeon (Belgique).
(Noël Godin, Les Amis de film et de la télévision, n° 272, décembre 1978)
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