Année : 1976. Durée : 10'
Fiche technique :
Réalisation, scénario, collages, son, montage : Gérard Courant.
Image (réalisée au banc-titre) : Patrice Kirchhofer.
Chansons : Elvis Presley.
Interprétation : Photographies de Marilyn Monroe, de nonnes espagnoles et de Guy Lux.
Production : K.O.C.K. Production, Gérard Courant.
Diffusion : Les Amis de Cinématon.
Tournage : Novembre 1976 à Paris (France).
Format : 16 mm.
Cadre : 1,35.
Procédé : Noir et blanc.
Collections publiques :
-Cinémathèque de Bourgogne-Jean Douchet, Dijon (France).
-BnF (Bibliothèque nationale de France), Paris (France).
Première projection publique : 5 février 1977, Ciné-club Amphi 24, Université de Jussieu, Paris (France).
Principaux lieux de diffusion :
-Festival Cinémarge, La Rochelle (France), 1977.
-Festival du Cinéma Différent, Chilly-Mazarin (France), 1977.
-Festival du Cinéma Indépendant, Avignon (France), 1977.
-Festival du Cinéma Indépendant, Thonon-les-Bains (France), 1977.
-Festival du Cinéma Différent, Thionville (France), 1977.
-Festival Musique et Cinéma, Rennes (France), 1978.
-Galerie de l’Ouvertür, Paris (France), 1978.
-Festival du Cinéma Différent, Colmar (France), 1978.
-Cinémathèque Française, Paris (France), 1978, 1979, 1991.
-Cinéma Palais des Arts, Paris (France), 1978.
-Ciné-Off au Festival du film, Cannes (France), 1979, 1980.
-C.A.C. Voltaire, Genève (Suisse), 1983.
-Cinémathèque Suisse, Lausanne (Suisse), 1983.
-Atelier de Recherche Esthétique, cinéma Le Lux, Caen (France), 1983.
-Théâtre de Poche, Bienne (Suisse), 1983.
-Cinémathèque de l’Arsenal, Berlin-Ouest (République Fédérale d’Allemagne), 1984.
-Studio Molière, Vienne (Autriche), 1984.
-Festival International, Leicester (Grande-Bretagne), 1985.
-Cinéma Studio 43, Paris (France), 1986.
-Cinémathèque Québécoise, Montréal (Canada), 1986.
-Rencontres du 8e type, Tours (France), 1991.
-Festival Côté Court, Pantin (France), 2000.
-Cinéma Expérimental Acte 2, Rétrospective Gérard Courant, Dijon (France), 2011.
-Site YouTube, 2012.
-"3.26", cinéma Lanteri, Pise (Italie), 2012.
-Site Dailymotion, 2014.
-Installation Sylvie Reymond-Lépine, Désir de cloître, Magadino (Suisse), 2014.
-Séminaire Gérard Courant, Université Abdelmalek Essaadi, Tétouan (Maroc), 2016.
-Nahal Student Short Film Festival, Téhéran (Iran), 2016.
-Hommage à Patrice Kirchhofer, Etna, Montreuil (France), 2023.
Restauration :
-Cinémathèque de Bourgogne-Jean Douchet (France).
-Fondation Gérard Courant (France).
Prix, récompenses :
-Fait partie de la liste de 1358 films établie par SmokingPizza, Bodies & Faces, site Letterboxd (Nouvelle Zélande), 2019.
Mes vrais débuts, mon premier vrai film, c’est Marilyn, Guy Lux et les nonnes, mis au monde en novembre 1976. Une grossesse longue à se dessiner. Mais le bébé se porte bien… et le cinéaste hyper-hollywoodien professionnel pointe le bout de son nez !
Depuis le mois de septembre 1976, nous nous activions énergiquement avec quelques amis cinéastes (Patrice Kirchhofer, Martine Rousset, Yves Marie Rollin, David Wharry) à la création de la Coopérative des Cinéastes, groupement dont nous espérions qu’il serait le centre de diffusion du cinéma d’avant-garde à Paris. Nous avions déjà réuni une trentaine de cinéastes (tels Chantal Akerman, Luc Moullet, Pascal Kané, Louis Skorecki, Maurice Lemaître) et, à cause de cette préparation, la réalisation de mon premier-premier film ou, si vous préférez, de mon premier film-film, s’en trouvait retardée.
En cette fin d’été, j’avais deux projets : l’un était le filmage en un seul plan-séquence d’un homme en train de raser sa barbe (1), l’autre était un collage de photographies de Marilyn Monroe et de Guy Lux (2).
Accaparé par mes activités de la Coopérative, je n’avais pas le temps de m’investir dans le tournage d’un film. Enfin, c’est ce que je me faisais croire à moi-même.
Dans nos nombreuses réunions de cinéastes, on me dit qu’il n’était pas très sain que le président de l’association – c’est de moi qu’il s’agissait – ne fusse pas, lui-même, auteur de film. Mes activités n’étaient pas les seules en cause de ma stérilité créatrice. Elles étaient simplement un paravent derrière lequel, honteusement, j’essayais de masquer ma peur.
Ma peur de quoi ?
Ma peur de l’échec.
Ma peur de ne pas réussir un film qui, de surcroît, se devait d’être, vu ma situation, d’avant-garde.
Ma peur d’être en-deça de ce que je croyais être capable de faire.
J’avais des prises de position violentes contre le CCC (Cinéma de Consommation Courante) et je savais qu’au sein de notre petit groupe, on m’attendait au tournant.
Mais cette situation ne pouvait pas durer indéfiniment. Il fallait bien qu’à un moment donné je me lance à l’eau, que je prenne le taureau par les cornes.
Un jour, mon ami le cinéaste Patrice Kirchhofer, membre-fondateur très actif de la Coopérative des Cinéastes et cameraman expérimenté, vint me voir et me dit : « Choisis une date, on tourne ton film ». J’étais bien obligé – et très heureux ! – d’accepter.
Au début du mois de novembre 1976, en une soirée, sur un banc-titre improvisé et trafiqué, nous filmâmes mes deux collages avec la caméra Beaulieu 16 mm de Patrice.
Ça y était, j’étais cinéaste ! J’étais débarrassé d’un poids harassant. J’avais brisé un tabou – le tabou.
Nous avions tourné environ sept minutes de film et pour le montage que je réalisais seul à la visionneuse, toujours chez Patrice, j’ajoutais environ trois minutes d’image noire entre le générique et le premier vrai plan de mon film. En quelques heures, Marilyn, Guy Lux et les nonnes était terminé. Vu les moyens financiers réduits que j’avais à ma disposition et le peu de temps que je m’étais imposé pour la réalisation de ce film, il ne m’était pas possible d’entreprendre une bande-sonore sophistiquée. Je me contentais de « plaquer » sur les images trois chansons d’Elvis Presley, parmi ses plus sensuelles et ses plus cools.
Et le tour fut joué !
Il restait à livrer le film au public. Ce fut fait le 5 février 1977 à l’université Jussieu à Paris.
Je me demandais ce qui m’attendait. Le film était-il suffisamment d’avant-garde ? Était-il assez minimal (j’en doutais) ? Est-ce que je ne risquais pas de décevoir puisqu’il n’était pas vraiment expérimental alors que le public était venu pour découvrir de l’avant-garde à tous crins ? Le film était-il compréhensible pour qui m’était étranger vu que j’abordais un style, un moyen d’expression et par conséquent une « écriture » – quel vilain mot pour parler du cinématographe ! – bref, une manière de faire, une touche que personne – et pour cause ! – ne connaissait ?
Voilà les questions qui se bousculaient dans ma tête quand le projectionniste lança ma petite centaine de mètres de pellicule dans le projecteur. Et cela ne faisait pas dix secondes – le temps du générique – que le film s’était enclenché que, déjà, la pellicule cassa.
On répare et, hop, le film (il s’agit à ce moment-là de l’image entièrement noire) démarre.
La centaine de personnes présente ne sait plus si le film est commencé ou non bien qu’il entende la savoureuse voix du King les bercer dans le noir. Chacun pivote sur son siège pour porter son regard en direction de la cabine de projection où tout semble se dérouler normalement.
Est-on dans le film ?
Au terme de trois interminables minutes d’obscurité et d’anxiété, une image apparaît, sortant peu à peu du flou : on reconnaît Guy Lux, un large sourire faisant apparaître sa dentition supérieure. Rires dans la salle. Les rires se poursuivront jusqu’à la fin du film.
Ouf, Marilyn, Guy Lux et les nonnes n’était pas resté indifférent et c’était l’essentiel même si, chez les gens qui me fréquentaient, on attendait un travail plus sérieux et, pire, plus radical dans la recherche.
Fichtre. J’avais fait mon film et tout le reste n’était qu’accessoire. Et c’est dans les rires de l’assistance que résida ma plus grande surprise : j’avais réalisé un film drôle ou, tout du moins, ironique sans le savoir. Ce film m’apprit beaucoup de choses sur moi-même et me permit de comprendre un certain nombre de relations « flottantes » que j’avais eues avec des gens insensibles à mon ironie. Il m’était arrivé de « froisser » involontairement des amis par cette ironie, sans m’en rendre compte le moins du monde. J’étais ainsi. Voilà tout. En dix minutes de cinématographe, j’en avais beaucoup plus appris, me semble-t-il, sur moi-même, qu’en vingt-cinq ans de vie.
Authentique leçon de communication.
Véritable sérum de vérité du cinématographe.
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1 Ce film fut réalisé en mars 1978 et s’appelle Rasage.
2 Des années 1960 au début des années 1980, Guy Lux fut l’un des animateurs les plus populaires de la télévision française.
(Gérard Courant)
Il y avait des films de réalisateurs confirmés tandis que de jeunes réalisateurs se faisaient les dents et que Gérard Courant se lançait carrément dans l'expérimental avec Marilyn, Guy Lux et les nonnes sur une musique d'Elvis Presley - tout un programme.
(Marion Sarazin, Pariscope, octobre 1977)
Marilyn, Guy Lux et les nonnes est du cinéma d’avant-garde, sur une musique d’Elvis Presley et un hommage à Marilyn. Du cinéma sur la durée réelle ou durée diégétique.
(Jeanne Folly, Libération, 19 juin 1978)
Marilyn, Guy Lux et les nonnes où les trois « figurants » se succèdent, se rencontrent sur une bande sonore d’Elvis Presley, me semble fortement marqué par l’état d’esprit qui régnait à la Factory d’Andy Warhol dans les années soixante. Il introduisait en outre dans ce festival (N.B. : de Colmar) la dimension de l’humour. En tout cas, ceux qui sont restés jusqu’au bout samedi soir se sont franchement éclatés un bon coup en voyant danser spontanément Gaël Badaud et Katerina Thomadaki devant le projecteur durant Marilyn tandis que la salle contribuait à la fête.
(Norbert Sparrow, L’Alsace, 11 juillet 1978)
Tout récents sont à signaler (...) les pochades d'un Gérard Courant (M M M M M et Marilyn, Guy Lux et les nonnes).
(Dominique Noguez, Éloge du cinéma expérimental, éditions Centre Pompidou, 1979)
Le provocateur Marilyn, Guy Lux et les nonnes.
(Vincent Tolédano, La Revue du cinéma, n°358, février 1981)
Les films présentés définissent un travail sur le regard (Marilyn, commence par trois minutes d'images noires), et un travail sur le rythme : l'image projetée explore, scrute (gros plans sur une photo de Marilyn).
(Lysianne Léchot, Journal du Jura, mars 1983)
Film provocateur ou, en tout cas, empreint de beaucoup d’humour, Marilyn, Guy Lux et les nonnes (1976) est une pochade qui a été le point de départ de Gérard Courant dans le septième art et qui fait se succéder et se rencontrer les trois figurants sur une bande sonore d’Elvis Presley.
(Jaques Dutoit, Le Journal du Jura, 17 mars 1983)
Les collages de Gérard Courant dans Marilyn, Guy Lux et les nonnes (1976).
(Dominique Noguez, Trente de cinéma expérimental en France, éditions A.R.C.E.F., 1983)
Marilyn apparaît dès son premier film : Marilyn, Guy Lux et les nonnes. Miss Lance-Flammes. Pin-up pendant la guerre de Corée. "J'étais le genre de filles qu'on retrouve morte dans une chambre minable, un flacon de somnifères à la main".
(Jacques Donguy, Art press, n°84, septembre 1984)
L'entreprise de Gérard Courant semble bien se constituer à partir d'un travail sur la dimension photographique du cinéma. À cette fin, il utilise les techniques du collage (notamment dans Marilyn, Guy Lux et les nonnes, 1976) (...) comme pour rappeler que le cinéma est composé de photos mises les unes à la suite des autres (...).
Une telle intensité émotive accentue la force des repères culturels qu’il accumule : l’image de Marilyn Monroe et la musique d’Elvis Presley dans Marilyn, Guy Lux et les nonnes (...).
Les mythes culturels qui composent les films de Gérard Courant sont davantage présentés sous le mode de la fascination que de la contestation, tout en cherchant à contrer l’aliénation. La façon adoptée par le cinéaste consiste à mettre en valeur la strate « cancéreuse » du système où le désir semble illimité, où les frontières sont bousculées, où passion et mort, beauté et violence se côtoient : des personnages qui magnifient le système tout en le pervertissant.
Ainsi, Marilyn Monroe dans Marilyn, Guy Lux et les nonnes : « J’étais le genre de fille qu’on retrouve morte dans une chambre minable, un flacon de somnifère à la main ».
(Michel Larouche, Parachute, n°44, septembre - octobre - novembre 1986)
Il avait livré au public quelques oeuvres (...) où se remarquait déjà une grande prédilection pour les célébrités, mises à contribution dans les titres (Marilyn, Guy Lux et les nonnes), ou sur la bande-son.
(Dominique Noguez, Cinématon, éditions Veyrier, 1989)
Courant a fait son premier film en 1976, Marilyn, Guy Lux et les nonnes, « un travail à partir de photographies et mis en parallèle avec des chansons très cool d’Elvis Presley ». Le cinéaste ne cesse de mettre en avant la photographie, des photomatons aux Cinématons, de la photo de famille aux Portraits de groupe, jusqu’à filmer un par un des photogrammes pour Les Aventures d’Eddie Turley, long métrage de 1987. Il faut y ajouter la télévision, sa logique de flux que vient contredire la fixité (du cadre, du photogramme). La télévision, c’est aussi Guy Lux, Elvis Presley, le lieu de la variété, de la mémoire culturelle et populaire.
(Sébastien Bénédict, Cahiers du cinéma, n°573, novembre 2002)
Peu de gens le savent : un an avant ce film (Drôles de zèbres), le dorénavant feu Guy Lux avait déjà contribué au 7e art à l'occasion d'un autre film : Marilyn, Guy Lux et les nonnes.
(Tryph, 14 juin 2003)
His cinematic debut was clearly influenced by both Dada and Pop Art movements, as you can see in his short film Marilyn, Guy Lux et les Nonnes (Marilyn, Guy Lux and the Nuns, 1976).
(Raphaël Bassan, Encylopaedia Universalis, 2005)
Grâce à l'aide du cinéaste expérimental Patrice Kirchhofer, Gérard Courant réalise en 1976 son premier court-métrage, Marilyn, Guy Lux et les nonnes.
(Wikipedia, 2007)
Avec un goût du titre surréaliste, il nomme son premier court, en 1976, Marilyn, Guy Lux et les nonnes.
(Clément Ghys, Libération, 29 juillet 2012)
Gérard Courant repousse l’échéance, il appréhende le moment où il va prendre la caméra. Mais finalement aidé et poussé par son ami Patrice Kirchhofer (membre de la Coopérative des cinéastes), Gérard Courant réalise en 1976 son premier film, un court métrage d’une dizaine de minutes s’intitulant Marilyn, Guy Lux et les nonnes. Constitué de photos filmées en 16mn, il va être projeté quelques mois plus tard à l’université de Jussieu lors d’une projection organisée par la Coopérative des cinéastes. À la surprise du cinéaste, le film reçut un bon accueil.
(Estelle Pajot, L’oeuvre filmée de Gérard Courant, Université de Bourgogne, UFR Sciences Humaines et Sociales, Département Histoire de l’Art et Archéologie, sous la direction d’Isabelle Marinone, 2014)
Pouvez-vous expliquer votre idée de la musique dans votre cinéma ?
D’une manière générale, la musique de mes films est une entité à part entière. Elle n’est jamais une illustration de la bande image. Elle a sa propre identité. La musique vit sa propre vie. Elle peut critiquer la bande image, la remettre en question, voire s’opposer à elle. Dans des films comme Marilyn, Guy Lux et les nonnes (1976), Je meurs de soif, j’étouffe, je ne puis crier… (1979), Coeur bleu (1980), la Décalogie de la nuit (2007/2008), la musique ne soutient jamais l’image : elle la pervertit.
(entretien avec Gérard Courant, Brown Bunny Magazine, 2014)
C’est maintenant ou jamais que le coup de charme donne la fièvre. STOP. Malin, le Courant. STOP. Dans ce film, il réunit deux mythes qui n’ont jamais tourné ensemble. STOP. Ne nous laissons pas abuser par le mythe.
(Alain Paucard, 28 octobre 2014)
Un homenaje a Marilyn Monroe, Guy Lux y tres monjas para generar un choque entre lo tradicional y lo art pop, sostenido sobre un collage de planos detalle y cortejado con las canciones más seductoras de Elvis Presley. La ironía la veo, pero no me da tanta risa este dadaísmo como le dio a los presentes en su estreno, quizás su efecto tenía que ver con el pensamiento de la época.
(Recess247, Letterboxd, 09 Sep 2021)
I was wilding out to this one.
(Swain, Letterboxd, 06 Oct 2024)
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