LES OLYMPIADES 80 de YOURI OZEROV.

Cinéma 81, n° 274, octobre 1981.

Il y avait l’idolâtrie du corps resplendissant (Les Dieux du stade de Leni Riefenstahl), le goût de l’effort (Lelouch et consorts dans Tokyo Olympiades). Mais il y a désormais le vide. Et le vide, c’est Les Olympiades 80 de Youri Ozerov. Pourquoi restons-nous de marbre quand Wells gagne le 100 mètres et Coe le 800 mètres (à moins que ce soit le 1500 mètres, peu importe) en finale des Jeux Olympiques de Moscou ? Parce qu’ils sont filmés comme des savates. Et le cinéaste nous prouve que si, comme le disait Lubitsch, avant de savoir filmer des acteurs il faut déjà savoir filmer des montagnes, dans le cas du sport filmé, il s’ajoute une complication supplémentaire : les athlètes improvisent. Ce que jamais Youri Ozerov n’a réussi à comprendre. Résultat : pompiérisme, dégoût des corps, incapacité de cadrer la lutte pour la victoire qui, il faut bien l’avouer comme dirait Nick Ray, est amère. Afghanistan et États-Unis d’Amérique sont impérativement rayés de la carte du monde. Le commentaire, style actualités pétainistes, nous le dit : l’Union Soviétique est le paradis de la liberté. On peut même y célébrer le culte religieux que l’on désire. Musulmans et Orthodoxes d’accord, mais les Juifs, non, quand même ! Il ne faut pas exagérer !

Conclusion : autant Les Olympiades 80 est incapable de représenter la religion juive (ce qu’on ne lui avait jamais demandé !), autant il se montre inapte, maladroit à faire vivre cette grande fête politico-sportive que sont les Jeux Olympiques. Je l’avoue : j’ai quitté la salle, perplexe. Non que j’espérais monts et merveilles de ce film de propagande, mais il était possible d’imaginer, justement dans la propagande, un peu plus de modestie dans la grandeur et de noblesse dans la mise en scène. Ce qui me chagrine le plus dans tout ça c’est que Ozerov filme les stades comme des camps d’internement. Une espérance : attendre quatre ans et le film que les Américains ne manqueront pas de nous concocter pour Los Angeles.

Gérard Courant.

 


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