image du film.L’HOMME ATLANTIQUE DE MARGUERITE DURAS PAR GÉRARD COURANT

Année : 2010. Durée : 11'

Fiche technique :
Réalisation, image, texte, montage : Gérard Courant.
Partition sonore : Gérard Courant, Élisa Point.
Production : Gérard Courant, Les Amis de Cinématon, Les Archives de l’Art Cinématonique, La Fondation Gérard Courant.
Diffusion : Les Amis de Cinématon.
Tournage : Pourville-sur-mer (France).
Format : Vidéo.
Cadre : 4/3.
Procédé : Couleur.
Collection publique : BNF (Bibliothèque Nationale de France), Paris (France).
Principaux lieux de diffusion :
-Site YouTube, 2012.
-Site Vostfr, 2013.
-Site Solarwindenergy, 2013.
-Site Demo.SIALIFE.com, 2013.
-Site Trucs-astuces.mobi, 2013.
-Site Gaming and software videos, 2013.
-Site Okm (Japon), 2013.
-Site Magicien Mentaliste, 2013.
-Site Kemifun, 2013.
-Site Tvclips.INFO, 2013.
-Site Arkadaslik, 2013.
-Site Beatzone (Tchéquie), 2013.
-Site Msnsoft. net, 2013.
-Site Vidgrids.com, 2013.
-Site SenseTube, 2013.
-Gérard Courant à Dijon, Université de Bourgogne, Dijon (France), 2011.
-Festival Côté court, Pantin (France), 2015.
-Séminaire Gérard Courant, Université Abdelmalek Essaadi, Tétouan (Maroc), 2016.
-Alexandria International Film Festival, Alexandrie (Égypte), 2019.
Dédicace : Le film est dédié à Marguerite Duras et Marylène Négro.

Présentation >>>

Réalisé en 1981, avant Dialogues de Rome, son dernier opus cinématographique, L’Homme Atlantique est l’avant-dernier film de Marguerite Duras (filmé en 1983, Les Enfants, qui lui est souvent attribué à tort, est un film qu’elle s’est contentée de superviser et qui est signé par son fils Jean Mascolo et par Jean-Marc Turine). L’Homme Atlantique est le film le plus radical de l’auteur de Hiroshima mon amour. Il est constitué partiellement de chutes de Agatha, son film précédent et, essentiellement, d’images noires. La bande sonore est la lecture par Marguerite Duras elle-même de son texte L’Homme Atlantique qui fut édité en 1982 aux éditions de Minuit.

J’avais découvert ce film au Festival International du Jeune Cinéma de Hyères et j’avais eu l’occasion de lui consacrer une chronique pour la revue Cinéma 82, dans le numéro 277, daté de janvier 1982.

L’Homme Atlantique de Marguerite Duras par Gérard Courant est le filmage de ce texte au banc-titre en y intercalant des images noires.

(Gérard Courant).

LE TEXTE FILMÉ

L’Homme Atlantique est peut-être le premier film à vous faire regarder les images les yeux fermés. Peu importe, que certains cinéastes aient réussi auparavant, par éclairs, à réaliser la même prouesse ; jamais, avant Marguerite Duras, on avait été porté, corps et âme, vers un au-delà bien impossible à nommer, le projet lui-même, dans sa folie, ignorant sa destinée. Et pour cause !

Le fait est là ! On décolle. Peu importe aussi que l’on ne retienne, des paroles chuchotées par la voix de Marguerite Duras, peu du sens mais beaucoup de la sensualité d’une voix qui, depuis Le Camion, envahit de plus en plus un espace en friche. L’Homme Atlantique ne vous prouvera pas que le cinéma, c’est ça, ni qu’il faille absolument prendre ce cinéma comme modèle, ni que c’est un grand film, ni que le cinéma est le sommet de tous les arts, ni que le noir vaut mieux que le bleu, le rouge, le vert…. Non, L’Homme Atlantique est ailleurs, au-delà de tout le cinéma qui se fait et des films précédents de Marguerite Duras. Son au-delà, c’est l’absence d’au-delà. Son cinéma, c’est son absence de cinéma. L’Homme Atlantique vous prouvera seulement que le cinéma est fragile.

Il est juste de dire que ces quarante minutes de noir sont les plus belles images que Marguerite Duras ait imprimées sur la pellicule depuis Détruire, dit elle car, en gagnant ce pari fabuleux de faire rester un spectateur devant l’écran noir de son film, notre Marguerite nationale a atteint ce qu’elle désirait depuis longtemps : faire du vide une matière pleine, faire du néant, un océan d’images. Vous l’avez compris, L’Homme Atlantique est un film impossible. Paradisiaque. Vertigineux. Et, tout compte fait, l’entreprise méritait d’être tentée car, à voir l’air ébahi des spectateurs après ces quarante minutes de voyage intergalactique dans notre pensée, on ne peut que dire bravo à Marguerite Duras. Elle a essayé. Et elle a réussi. Pourquoi ? Peut-être parce que L’Homme Atlantique est un film de la peur. On pourrait le sous-titrer : Les Mystères de Marguerite. En imprimant des mots sur le néant, elle nous propulse dans le trou noir de sa pensée. Bringuebalé, chahuté, on en sort ragaillardi, pimpant neuf et lavé de mille détritus d’images qui nous collaient à l’esprit. Après tout, si un peintre a peur de la toile blanche et un écrivain la peur de la page blanche, pourquoi un cinéaste n’aurait-il pas la peur de l’écran blanc ? Et ainsi, ce dernier, incapable de projeter et d’imprimer quoi que ce soit, seulement des mots balancés par une voix d’outre-monde ?

Je donnerais tout ce que j’ai vu ces derniers mois pour ces quelques milliers de photogrammes noirs. Peu importe, enfin que Marguerite ait intercalé quelques chutes d’Agatha, comme pour nous sécuriser avant le grand plongeon final, car, quand on saute dans le vide, on n’a de compte à rendre à personne.

(Gérard Courant, Cinéma 82, n° 277, janvier 1982).

Critique >>>

LES LIMITES DU CINÉMA

Comme l’évoque Gérard Courant, nous serons confrontés aux limites du cinéma avec les photogrammes noirs de L’Homme Atlantique, « comme autant de trous noirs de la pensée ».

(D. Répécaud, Centre Malraux, Vandoeuvre, France, 2 mars 2010)



MAGNIFIQUE

Votre texte est vraiment magnifique !

(Gabrielle Reiner, 12 mars 2011)



INTENSE

Cher Gérard,

À l'instant je découvre ton film.

Il vole haut, à l'image de l'œuvre de Marguerite Duras : intense et magnifiquement écrit.

Quelle joie et quel honneur qu'il me soit dédié auprès de l'immense MD.

Je te remercie beaucoup, je suis très touchée.

Amicalement.

(Marylène Negro, 9 mars 2012)



TELLEMENT SENTI

Il est beau ton texte Gérard. Beau et tellement senti.

(Danièle Dubroux, 2 avril 2014)



L'IMAGE NOIRE

L’image noire est le paradoxe du cinéma lui-même. En effet, présent dans de nombreux films qu’ils soient courts ou longs, l’image noire témoigne pourtant de l’absence de lumière alors que la lumière est le principal élément du cinéma. Ces monochromes de noir ne sont pas sans rappeler les travaux d’artistes plasticiens, peintres, tel que le Carré noir de Malevitch (1913) ou encore les travaux de Pierre Soulages. Le noir offre ainsi une infinitude de variations, offrant alors une multitude de matières, de textures avec les différents noirs. Au cinéma, cette image noire parfois omniprésente, n’est pas perçue comme un déficit ou un vide. Elle acquiert, au contraire, une intense puissance, une présence et une existence à l’écran. C’est d’autant plus vrai dans Passage Through : A Ritual de Stan Brakhage, où il s’agit de passer à travers le temps et l’espace du rituel cinématographe. L’écran noir propose et insiste le spectateur à faire l’expérience sensible de la matérialité de la salle, mais aussi de s’interroger sur la place du spectateur, et de ressentir l’ensemble du dispositif de la salle de cinéma. L’image noire fait appel à l’imaginaire du spectateur, c’est un moment où chacun est libre de faire vivre cet écran. Le cinéma nous apparaît alors comme un art du temps, au moyen de la durée mais aussi un art de l’espace s’apparentant une nouvelle fois à l’art plastique. Réalisé en 1981 par Marguerite Duras, L’Homme Atlantique est le film le plus radical de la réalisatrice. Il est constitué essentiellement d’images noires et des chutes de son film intitulé Agatha. Ce n’est pas un film que l’on regarde mais un film que l’on vit. Marguerite Duras nous donne à vivre une expérience qui est indépendante du cinéma. Elle ne prétend pas nous offrir une nouvelle forme de cinéma mais un instant qui s’incorpore à un espace-temps. « Son cinéma, c’est son absence de cinéma », elle refuse ainsi le propre du cinéma : la représentation. Mais ce manque de représentation est pallié par l’utilisation de la voix-off (qui n’est autre que la voix de la cinéaste elle-même), permettant ainsi de créer un pouvoir émotionnel et métaphorique des plus intenses. Gérard Courant réalisera à partir de son texte écrit en 1982 son film L’Homme Atlantique de Marguerite Duras par Gérard Courant qui n’est autre qu’un hommage au film de Marguerite Duras, pour se faire il filme son propre texte au banc-titre en y intercalant des images noires.

Le noir n’est pas seulement dans l’image, il est aussi constitutif du cinéma en tant que tel. La question du noir est une question des plus complexes dans le langage cinématographique. Dans le cinéma muet, la question du noir était déjà présente, avec l’ouverture au noir et la fermeture au noir. Une fois la question du cinéma muet écartée, on s’aperçoit que les cinéastes ont réfléchi le noir autrement. Marguerite Duras et par extension Gérard Courant en fait l’extrême expérience. Ils ne sont pas les seuls. Dans son film Blanche-Neige, Monteiro réalise l’exploit de réaliser une grande partie de son film avec cette fameuse image noire. Le noir a toujours été et continue à être utilisé comme une couleur chargée d’une grande part de symbolisme.

(Estelle Pajot, L’oeuvre filmée de Gérard Courant, Université de Bourgogne, UFR Sciences Humaines et Sociales, Département Histoire de l’Art et Archéologie, sous la direction de Isabelle Marinone, 2014)



UN TEXTE FILMÉ

Si Courant n’a jamais filmé Duras, il fit partie de ces jeunes cinéphiles qui gravitaient à une époque dans son cercle (il était ami avec son fils Jean Mascolo) et il a toujours été un grand admirateur de la cinéaste. Pour preuve, (...) le texte extrêmement louangeur que Courant consacre à L’Homme atlantique dans la revue Cinéma 82 : « notre Marguerite nationale a atteint ce qu’elle désirait depuis longtemps : faire du vide une matière pleine, faire du néant, un océan d’images. ». A partir de ce texte, Gérard Courant a réalisé un film (L’Homme atlantique de Marguerite Duras par Gérard Courant), essentiellement composé d’un écran noir (forcément !) où viennent s’inscrire ses mots inspirés. Un bel exemple de ce que l’on pourrait appeler un « texte filmé ».

(Dr Orlof, Le journal cinéma du Dr Orlof, 28 février 2017)




 


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