image du film.PROMENADE DANS LES LIEUX DE MON ENFANCE DIJONNAISE (CARNET FILMÉ : 2 novembre 2008)

Année : 2008. Durée : 1 h 08'

Fiche technique :
Réalisation, concept, image, son : Gérard Courant.
Musique : Pianos de septembre de Élisa Point.
Interprétation : Les habitants de Dijon (France).
Production : La Fondation Gérard Courant, Les Amis de Cinématon, Les Archives de l’Art Cinématonique.
Diffusion : Les Amis de Cinématon.
Tournage : 2 novembre 2008 à Dijon (France).
Format de tournage : Vidéo Mini-DV.
Cadre : 4/3.
Procédé : Couleur.
Collections publiques :
BNF (Bibliothèque Nationale de France), Paris (France).
Cinémathèque de Bourgogne-Jean Douchet, Dijon (France).
Première projection publique : 22 octobre 2009, Cycle journal intime filmé, cinéma Eldorado, Dijon (France).
Dédicace : Le film est dédié à Pierre Demoor, fondateur et directeur de la revue Culture Cinéma.
Principaux lieux de diffusion :
-Festival Journal intime filmé, Dijon (France), 2009.
-Cinéma Eldorado, Dijon (France), 2009.
-Gulf Film Festival, Dubaï (Émirats Arabes Unis), 2011.
-Site Cinémathèque de Bourgogne-Jean Douchet, Dijon (France), 2011.
-Maison de l'étudiant, Dijon (France), 2011.
-Site YouTube, 2012.

Présentation >>>

Promenade dans les lieux de mon enfance dijonnaise est, en caméra subjective et en un seul plan-séquence, une errance à travers la ville de Dijon, où j’ai vécu de 1960 à 1975 de l’âge de 9 à 24 ans. Le film démarre à la gare de chemin de fer pour se diriger vers la place Darcy, la cathédrale Saint-Bénigne, les rues du Chapeau rouge, de la Liberté, du Bourg, Victor Dumay (où j’habitais), du Petit Potet (où je fréquentais l’école du même nom), Buffon, l’église Saint-Michel, le palais des ducs de Bourgogne, l’église Notre-Dame, la rue Musette, la place François Rude, à nouveau la rue de la Liberté et la place Darcy pour finir à la fontaine du square Darcy.

(Gérard Courant)



From and back to the Place d'Arcy in Dijon, we travel through the city of his childhood.

(G. C.)

Critique >>>

JE TE SALUE, MA VIEILLE DIJON…

Plutôt de vous parler de la pénible palme d’or de Cristian Mungiu (4 mois, 3 semaines, 2 jours), j’ai choisi aujourd’hui de me pencher sur un film qui n’appellera sans doute pas une flopée de commentaires mais qui me permettra d’évoquer une personnalité singulière au cœur du cinéma français : Gérard Courant.

Le nom de Courant est associé dans la mémoire des cinéphiles à cette œuvre unique qu’est Cinématon, entreprise à la Andy Warhol où le cinéaste filme des individus (célèbres ou inconnus) le temps d’un unique plan fixe muet de trois minutes. Libre à chacun de faire ce qu’il veut pendant ce laps de temps. On peut voir quelques Cinématons sur le site de Gérard Courant et affirmer qu’il s’agit là d’un des plus extraordinaires castings de toute l’histoire du cinéma (le cinéaste a réalisé plus de 2200 portraits !).

Parallèlement à cette œuvre monumentale, Courant s’est affirmé comme l’un des plus inventifs cinéastes « conceptuels » du moment en réalisant différentes séries (sa série Gare dure plus de trois heures et est constituée d’un ensemble de plans fixes – à la manière des frères Lumière – tournés dans différentes gares de France et du monde), en compressant des films à la manière de César (il a compressé À bout de souffle et Alphaville de Godard) et en tournant (en super 8 ou en vidéo) ce qu’il appelle des Carnets filmés dont Promenade dans les lieux de mon enfance dijonnaise est l’un des derniers avatars (1).

Le concept est ici très simple puisqu’il s’agit d’un unique plan-séquence d’une heure et huit minutes nous entrainant le long des rues de Dijon où le cinéaste déambule caméra à la main. La balade débute à la gare et nous mène dans divers endroits de la ville qui ont marqué le cinéaste : la cathédrale Saint Bénigne où il fit sa communion solennelle, la rue Victor Dumay où il vécut, l’école du Petit Potet et le lycée Les Arcades où il effectua sa scolarité…

Par ailleurs, Courant a inversé les « valeurs » de l’image (je ne sais pas comment on appelle cet effet) ce qui donne l’impression, pour reprendre les termes qu’on utilise lorsqu’il s’agit de films sur pellicule, que le film a été tourné « en négatif ». Du coup, la ville se transforme en une sorte de paysage de science-fiction qui, pour ma part, m’a plutôt fasciné. Je me doute que cette fascination est due au fait que les lieux filmés sont ceux que je parcours quotidiennement ou presque (j’aimerais beaucoup savoir ce que penserait du film quelqu’un qui ne connaît pas du tout Dijon !) et que c’est une expérience assez étonnante que de revivre cette promenade aussi étrange que familière dont le rythme est celui d’un rêve (les ciels sont particulièrement impressionnants, ainsi que les silhouettes fantomatiques qui semblent peupler la ville).

Lors du débat sur le journal intime filmé où il était invité, Courant nous a confié que les cinéastes auxquels il pensait tous les jours étaient avant tout les frères Lumière. Tout son travail conceptuel est effectivement marqué par cette volonté « d’archiver » les choses telles qu’elles sont. Si les frères Lumière avaient effectivement décidé de filmer toutes les rues de leur ville, ces films constitueraient aujourd’hui des documents exceptionnels. C’est dans cette optique que Courant réalise ses Carnets filmés avec une manière de lester d’une émotion particulière ce côté « documentaire » par le poids d’un vécu (les intertitres qui expliquent pourquoi certains lieux ont plus compté pour le cinéaste).

Il est probable que le Dijon qu’il a filmé un jour du mois de novembre 2008 ne sera plus le même dans dix ans et que ce film acquerra une dimension supplémentaire.

Ce qui est amusant, c’est ce qu’il capte également consciemment ou inconsciemment. Courant ne le sait sans doute pas lui-même mais il a réussi à filmer une « figure » du centre-ville dijonnais, un « chanteur » qui vient casser les pieds aux malheureux promeneurs voulant tranquillement boire un verre en terrasse en les haranguant et les invectivant entre deux morceaux de guitare généralement atroces ! (avec l’effet d’inversion, il est impossible d’identifier quiconque mais lui, je l’ai reconnu !)

De la même manière, le cinéaste n’hésite pas à filmer des hauts lieux touristiques de la ville (l’ours de Pompon du square Darcy, l’église Notre-Dame et Saint-Michel, la tour Philippe le Bon, la mairie…). Or, à un moment donné, il emprunte une rue qui m’a amené à penser qu’il allait filmer la fameuse chouette de l’église Notre-Dame, que tous les touristes viennent tripoter afin qu’elle exauce leurs vœux. Or, Courant passe rapidement à côté des badauds et n’a pas un regard pour la célèbre petite sculpture.

Ces détails ne parlent sans doute qu’aux dijonnais mais le dispositif même invite à la rêverie, à l’imagination et nous fait réfléchir à la notion de point de vue cinématographique. Qu’aurai-je filmé si j’avais été à la place de Courant ? Pour ma part, j’y ai beaucoup songé lorsque le cinéaste filme la rue Victor Dumay. Il se trouve que j’ai habité rue Sainte-Anne, une rue perpendiculaire à cette rue de son enfance. Ce fut alors un vrai suspense que de savoir si Courant, en arrivant à l’intersection, allait jeter un œil sur cette rue : il se trouve qu’il ne le fera pas !

Promenade dans les lieux de mon enfance dijonnaise est une expérience étonnante, à la fois « documentaire » et totalement onirique, qui donne envie de découvrir d’autres œuvres de Courant (dans la mesure où ces « films dispositifs » prennent aussi leur sens dans la répétition).

N.B. : Le titre de cette note est un clin d’œil à un autre bel hommage à Dijon.

(Dr Orlof, Le blog du Dr Orlof, 27 octobre 2009)

(1) Pour la petite anecdote, Courant nous a annoncé qu’il était en train de réaliser un projet complètement fou, à savoir de recenser toutes les rues, toutes les places et tous les ponts de la ville de Lyon, en ayant recours à des plans fixes à la manière des frères Lumière.



ERRANCIAS

Esta proyección hacia nuevas formas, este desmonte perpetuo, se inscribe a menudo en temáticas tradicionales, no exentas de disciplina histórica –pensamos por ejemplo en 24 Passions– y a veces ligadas a la propia infancia, como en Inventaire filmé des rues de la Croix-Rousse (usted nació en Lyon) o incluso Promenade dans les lieux de mon enfance dijonnaise

En cuanto a Promenade dans les lieux de mon enfance dijonnaise (2008), se trata de una deambulación por todos los lugares (casa, catedral donde hice mi comunión, colegio, instituto) que formaron parte de mi infancia y mi adolescencia. La película es la concretización de un viejo sueño que tenía desde que rodaba mis películas con película, de los años 70 hasta los 90. Soñaba con hacer películas de una hora en un solo plano-secuencia que sólo el video me habría permitido hacer. Claro, era imposible rodar con cámaras cinematográficas que sólo aceptaban 11 minutos de película (en 16 mm).

Cuando me pasé al digital a principios de los años 2000, me di cuenta de que no era tan fácil hacer películas con un concepto como el del plano-secuencia de una hora. He dedicado años a preparar un rodaje que me permita transformar ese sueño en realidad. (Me pasó lo mismo en los años 70 cuando reflexionaba sobre el concepto del Cinématon, que maduró durante años antes de que empezara a rodar el primer retrato).

No fue hasta el 2006, con L’Ascension de Notre-Dame de la Garde et la descente vers le Vieux-port de Marseille, que llegué a hacerlo. Luego le siguieron: Promenade dans les lieux de mon enfance dijonnaise (2008), Illuminations (2008), Tempête de neige sur Dijon (2009), Petit matin de Noël neigeux dans Dijon désert (2010), Les deux Lyon (2011), La Boucle (2011). Se trata siempre de errancias, cámara en mano, por ciudades donde he vivido (Lyon, Dijon, Semur-en-Auxois) o que me gustan (Marseille).

(Declaraciones recogidas por Nicolas Bohler en Buenos Aires el 21 de abril de 2012. Traducido del francés por Miguel Armas. elumiere.net)



ERRANCES

Cette projection vers de nouvelles formes, ce perpétuel défrichage, s’inscrit souvent dans des thématiques traditionelles, non dépourvues de discipline historique – on songe à 24 Passions par exemple – et parfois même liées à la propre enfance, comme dans Inventaire filmé des rues de la Croix-Rousse (vous êtes né à Lyon) ou encore Promenade dans les lieux de mon enfance dijonnaise

Quant à Promenade dans les lieux de mon enfance dijonnaise (2008), il est une déambulation dans tous les lieux (maison, cathédrale où j’ai fait ma communion solennelle, école, lycée) qui ont compté dans ma jeunesse et mon adolescence. Le film est la concrétisation d’un vieux rêve que j’avais lorsque, dans les années 1970 à 1990, je tournais mes films avec de la pellicule. Je rêvais de faire des films d’une heure en un seul plan-séquence que seule la vidéo aurait pu me permettre de réaliser. Bien sûr, c’était impossible à tourner avec des caméras cinématographiques qui ne pouvaient accepter au maximum que 11 minutes de film (en 16 mm).

Quand je suis passé au numérique au début des années 2000, je me suis aperçu que ça n’était pas si simple de faire des films avec un tel concept de plan-séquence d’une heure. J’ai mis des années à mettre au point un tournage qui me permette de transformer ce rêve en réalité. (Il s’était déjà passé la même chose dans les années 1970 quand je réfléchissais au concept de Cinématon qui a mûri pendant des années avant que je commence à tourner le premier portrait).

Ce n’est qu’en 2006 avec L’Ascension de Notre-Dame de la Garde et la descente vers le Vieux-port de Marseille que je suis passé à l’acte. Ont suivi ensuite : (2008), Illuminations (2008), Tempête de neige sur Dijon (2009), Petit matin de Noël neigeux dans Dijon désert (2010), Les deux Lyon (2011), La Boucle (2011). Ce sont exclusivement des errances, caméra à la main, dans des villes où j’ai vécu (Lyon, Dijon, Semur-en-Auxois) ou que j’aime (Marseille).

(Propos recueillis par Nicolas Bohler à Buenos Aires (Argentine) le 21 avril 2012, elumiere.net)







 


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